Dans quelques heures, le peuple malgache va tourner une nouvelle page de son histoire après cinq années de transition désastreuse pour le pa...
Dans quelques heures, le peuple malgache va tourner une nouvelle page de son histoire après cinq années de transition désastreuse pour le pays. Tout l’avenir du pays repose désormais sur Hery Rajaonarimampianina, déclaré le 17 janvier 2014 définitivement élu Président de la République.
Dans une interview à RFI le 22 janvier 2014, Hery Rajaonarimampianina a affirmé vouloir rétablir la confiance entre la population et ses dirigeants : « C’est ça qui manquait, donc moi, je pense que c’est le socle de toute chose. Dès que l’État de droit sera mis en place, je suis tout à fait convaincu que ces genres de phénomène [comme les trafics de bois de rose] vont vite se dissiper. ».
Robinson
Son concurrent Jean-Louis Robinson, lui, a continué à contester ces résultats : « J’ai respecté toutes les règles, les textes en vigueur, toutes les instances, la Feuille de route, et mon adversaire. Aujourd’hui, la Cour électorale spéciale vient de piétiner la démocratie. Mais je ne baisserai pas les bras pour autant. » (17 janvier 2014 sur sa page Facebook), en précisant : « Nous contestons ces résultats car aucune de nos requêtes n’a été reçue. La Cour a avancé qu’il n’y avait pas eu de preuves pour nos requêtes en ce qui concerne les irrégularités dans l’organisation des élections alors qu’effectivement nous en avions fourni. ».
Le samedi 18 janvier 2014, Jean-Louis Robinson a organisé un rassemblement au Magro à Behoririka où il y a eu très peu de violence et au cours duquel il a déclaré : « Ce n’est pas encore le moment de descendre dans les rues. ». Il a en effet soupçonné l’entrisme de quelques mercenaires pour décrédibiliser le mouvement de contestation.
Le 22 janvier 2014 les rumeurs d’un retour de l’ancien Président Marc Ravalomanana à Madagascar le 25 janvier 2014 ont été immédiatement démenties par ses proches : « Un tel projet ne figure pas à l’ordre du jour » (Guy Rivo Randrianarisoa) et les partisans de Marc Ravalomanana ont fait savoir que son retour ne pourrait se faire que dans la légalité et dans le cadre de la Feuille de route.
Quel sera le nouveau Premier Ministre ?
Comme l’ont insisté surtout les représentants de l’Union Européenne, le processus électoral n’est pas encore terminé à Madagascar car il faut encore attendre que la CES proclame les résultats définitifs des élections législatives qui avaient eu lieu en même temps que le second tour de l’élection présidentielle le 20 décembre 2013. Cette proclamation devrait se tenir avant le 10 février 2014. Par ailleurs, des élections communales auront lieu le 15 avril 2014.
La CENIT avait déjà proclamé le 10 janvier 2014 les résultats provisoires des élections législatives. 2054 candidats aux législatives étaient en lice pour l’élection des 151 députés. D’après ces résultats, le mouvement émanant d’Andry Rajoelina (le MAPAR) obtiendrait la majorité relative avec 51 à 53 sièges (soit seulement un tiers de la chambre) suivi d’un groupe d’indépendants, puis, seulement en troisième position, de la mouvance Ravalomanana (les résultats affichés par la CENIT le 10 janvier 2014 sont peu exploitables).
Cela signifie que selon la procédure constitutionnelle (article 54 de la Constitution), ce sera le mouvement d’Andry Rajoelina qui proposera le nom du futur Premier Ministre nommé par Hery Rajaonarimampianina. Dans tous les cas, la mouvance Ravalomanana est la grande perdante de ces élections. Lors de l’inauguration de l’Hôpitaly manara-penitra à Andohatapenaka, le 22 janvier 2014, Andry Rajoelina expliquait doctement : « Si le nouveau Président me sollicite, je suis prêt à collaborer avec lui, si l’on ne veut pas de mes services, j’ai déjà d’autres projets. ».
Si jamais Andry Rajoelina, dans un scénario à la russe, était nommé Premier Ministre, ce serait une grave erreur et tous les espoirs de réconciliation nationale partiraient en fumée.
Hery Rajaonarimampianina a dit à ce sujet le 22 janvier 2014 sur RFI : « La publication définitive des membres qui seront élus n’est pas encore faite, jusqu’à aujourd’hui. Donc, moi, je préfère vraiment attendre cette publication définitive par la Cour électorale spéciale et à ce moment-là, on verra la configuration des rapports de force. (…) On peut tout imaginer, mais c’est le Président qui décide. Je vais décider pour le bien du pays. ».
Tout repose sur un seul homme
Visiblement, le mouvement de contestation électorale ne semble pas soutenu par la population qui préfère la mise en place rapide d’un pouvoir enfin stable et reconnu par les instances internationales pour pouvoir recommencer à obtenir des aides financières et faire redémarrer l’économie du pays.
C’est ce qui distingue cette situation de la situation du premier semstre 2002 où le différend électoral entre Didier Ratsiraka et Marc Ravalomanana s’était terminé dans un bain de sang et six mois de paralysie généralisée du pays.
Aujourd’hui, Hery Rajaonarimampianina jouit d’un état de grâce exceptionnel pour prendre les décisions utiles à son pays afin de se réconcilier et dépasser les mésententes du passé. Pour cela, seul un gouvernement d’union nationale donnera cette cohérence et ce crédit de ne pas chercher à gouverner avec un esprit partisan. La fenêtre des possibles est courte. Espérons qu’elle sera utilisée à bon escient.
Sylvain Rakotoarison
http://www.rakotoarison.eu
Les cérémonies se feront sur deux journées.
Ce vendredi 24 janvier 2014 au Palais d’État d’Iavoloha est prévue la
passation des pouvoirs entre le Président de la Haute autorité de
transition Andry Rajoelina et le Président élu Hery Rajaonarimampianina
(qu’il avait soutenu) et ce samedi 25 janvier 2014 au stade de Mahamsina
aura lieu l’investiture du premier Président du la IVe République malgache en présence de quelques dirigeants étrangers et de l’ensemble de la classe politique.
Un membre du comité d’organisation, Norbert Lala Ratsirahonana, a confié que tous les candidats à l’élection présidentielle de 2013 ont été invités ainsi que Lalao Ravalomanana, l’épouse de l’ancien Président.Les personnes qui assisteront à la cérémonie seront fouillées à l’entrée par les forces de l’ordre pour éviter tout incident.
Quelques dirigeants étrangers, cela signifie que ne sont pour l’instant attendus que quatre chefs d’État, à savoir James Michel (Président de la République des Seychelles), Hifikepunye Pohamba (Président de la République de Namibie et Président de la Troïka de la SADC), Kailash Purryag (Président de la République de Maurice) et Ikililou Dhoinine (Président de l’Union des Comores).
La France, elle, ne s’honore pas beaucoup en ayant décidé le 21 janvier 2014 de n’envoyer qu’une simple sous-ministre sans éclat, la (très incompétente) Ministre déléguée chargée de la Francophonie, Yamina Benguigui, dont la venue a déjà suscité l’ironie dans des forums malgaches (par exemple, ce type de réflexion : « La bobo socialo de service ! Franchement ! Ça montre le peu de considération de Guimauve le conquérant envers Madagascar ! Pourquoi pas Nicolas Bedos ou Ruquier pendant qu’il y est ? (…) Dans la hiérarchie protocolaire, c’est pas top-top. Il aurait dû envoyer Julie Gayet… Là on aurait su qu’il prenait Madagascar au sérieux ! »). Initialement, c’était le Ministre écologiste délégué chargé du Développement, Pascal Canfin, qui avait été attendu.
Parmi les autres délégations étrangères, le Japon sera représenté par Ishihara Hirotaka, vice-Ministre japonais des Affaires étrangères.
Revenons à la chronologie de ces derniers jours
Le 3 janvier 2014, la Commission électorale nationale indépendante pour la transition (CENIT) avait proclamé Hery Rajaonarimampianina élu avec 53,50% à l’élection présidentielle dont le second tour s’était tenu le 20 décembre 2013. Son rival malheureux Jean-Louis Robinson avait fortement contesté ces résultats en parlant de fraude massive et estimait dès le lendemain qu’il avait les preuves que les résultats étaient inversés, en revendiquant 52,87% des suffrages à son profit.
Cependant, ce fut sans surprise que la Cour électorale spéciale (CES), plus haute instance officielle, a rejeté les supposées preuves présentées par ce candidat et a confirmé définitivement le 17 janvier 2014 vers onze heures l’élection de Hery Rajaonarimampianina en lui retirant néanmoins 0,01% des suffrages proclamés deux semaines avant.
Les résultats définitifs
Les résultats définitifs du second tour de l’élection présidentielle du 20 décembre 2013 sont donc les suivants.
Inscrits : 7 971 790 électeurs.
Votants : 4 043 246 inscrits (50,72%).
Blancs et nuls : 191 786.
Suffrages exprimés : 3 851 460.
Hery Rajaonarimampianina : 2 060124 voix (53,49%) élu.
Jean-Louis Robinson : 1 791 336 voix (46,61%) battu.
La participation, si elle est plus de 10% plus faible qu’au premier tour, elle reste cependant élevée compte tenu de l’histoire malgache (les précédentes élections) et de sa géographie au moment de la saison des pluies (dans certaines zones très reculées), et compte tenu aussi que le duel final n’avait pas enthousiasmé beaucoup les foules puisque cela revenait à un duel par procuration entre Marc Ravalomanana (le Président destitué) et Andry Rajoelina (l’auteur du putsch du 17 mars 2009).
L’écart entre les deux candidats reste d’ailleurs faible (moins de 270 000 voix) quand on regarde l’historique électoral de Madagascar. Que ce scrutin avec ces résultats définitifs soit sincère ou pas, il sera toujours très difficile de l’apprécier. Dans tous les cas, la page est maintenant tournée.
Une élection reconnue à l’intérieur…
Le fait est que non seulement Hery Rajaonarimampianina a été déclaré officiellement élu par une instance qui était reconnue de tous les candidats, mais la plupart des anciens candidats du premier tour ont également reconnu cette élection, ainsi que la plupart des pays étrangers.
Ainsi, les réactions de reconnaissance sont très nombreuses. Le Premier Ministre malgache, Jean Omer Beriziky, en déplacement à Genève le 18 janvier 2014, a exhorté le peuple malgache de garder son calme, d’avoir confiance et d’accepter le résultat de la CES.
Le parti écologistes de Sarah Georget (qui fut candidate au premier tour de la présidentielle et qui a soutenu au second tour Jean-Louis Robinson) a reconnu l’élection en saluant le 20 janvier 2014 « sincèrement et respectueusement le nouveau Président de la République Malagasy ».
Un autre parti qui avait soutenu Jean-Louis Robinson, Hrad Iloafo, a également reconnu l’élection de Hery Rajaonarimampianina le 21 janvier 2014.
Et à l’extérieur
Du côté français, l’ambassadeur de France à Madagascar, François Goldblatt, a déclaré : « Ce verdict consacre l’aboutissement du processus de restauration de la démocratie que le peuple malgache attendait depuis si longtemps. » (17 janvier 2014). Dans la soirée, c’est le Ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, qui a confirmé : « (…) La France adresse ses félicitations et ses vœux de réussite au Président élu, Hery Rajaonarimampianina. Cette élection (…) doit marquer pour Madagascar un nouveau départ après la longue crise politique et institutionnelle que le pays a connu. La France rend hommage aux partenaires de la communauté internationale qui ont permis la tenue de cette élection. » (17 janvier 2014).
Les félicitations du Président français François Hollande ne sont parvenus que le lendemain par une lettre à Hery Rajaonarimampianina : « Ces élections viennent clore près de cinq années de crise politique et institutionnelle. Votre élection, au terme d’un processus électoral dont la crédibilité a été saluée par l’ensemble des observateurs ouvre un nouveau chapitre de l’histoire de Madagascar. » (rendue publique le 19 janvier 2014).
L’ambassadeur de l’Union Européenne, Leondias Tzapisdis était également sur la même longueur d’onde : « Je ne peux que saluer cette nouvelle et très importante étape. » (17 janvier 2014). La Haute représentante des affaires étrangères de l’Union Européenne, Catherine Ashton, a invité le 20 janvier 2014 « le Président élu et toutes les parties prenantes au processus électoral à la retenue et au respect des procédures juridiques établies dans le cadre de ce processus » et les a encouragés « à faire preuve d’esprit d’ouverture et de réconciliation dans la mise en place des nouvelles institutions issues des élections qui consacrera le retour de Madagascar à l’ordre constitutionnel, permettant ainsi la normalisation de ses relations avec l’Union Européenne ».
Le Secrétaire Général de l’ONU, Ban Ki-moon « appelle le nouveau gouvernement à tendre la main à l’opposition et à diriger le pays dans l’intérêt de tous ses citoyens. Il encourage les dirigeants politiques et les institutions étatiques à travailler ensemble pour arriver à une véritable réconciliation, à l’approfondissement de la gouvernance démocratique et à la reprise économique. Les Nations Unies continueront leur soutien au développement et au progrès démocratique à Madagascar. » (19 janvier 2014).
La Commission de l’Océan Indien (COI), qui sera présidée par Madagascar en début avril 2014 (la décision a été prise le 21 janvier 2014), a elle aussi été soulagée : « Cette investiture sera une bouffée d’oxygène pour tous les Malgaches et pour toute l’Indianocéanie. » (17 janvier 2014). Tout comme la Présidente de la Commission de l’Union africaine Dlamini-Zuma qui a encouragé les Malgaches a gardé leur sens des responsabilités pour consolider les progrès remarquables qui ont été accomplis et qui a demandé aux partenaires financiers internationaux d’accompagner le pays dans son effort de relance économique (19 janvier 2014).
L’ambassadeur des États-Unis à Madagascar a également salué le 19 janvier 2014 la proclamation des résultats définitifs et a félicité les autorités pour l’organisation du scrutin. Le même jour, le Ministre japonais des Affaires étrangères faisait part de la même impression : « Le Japon souhaite vivement que ces résultats seront acceptés par toutes les parties prenantes malgaches et l’ensemble de la communauté internationale, et que l’instauration de l’ordre constitutionnel sera pacifiquement réalisée dans les meilleurs délai.s » (19 janvier 2014).
Le Président de Djibouti, Ismail Omar Guelleh, a émis « le vœu d’un prompt retour à la croissance économique » à Madagascar (20 janvier 2014). Le porte-parole du Ministère chinois des Affaires étrangères, Hong Lei, a déclaré de son côté : « La Chine espère que cette élection permettra à Madagascar de mettre fin à la crise politique actuelle et que le pays pourra maintenir la stabilité et le développement. » et a précisé : « La sortie de crise de Madagascar créera des conditions favorables à l’élargissement de la coopération entre nos deux pays dans divers domaines. (…) [La Chine] entend travailler de concert avec [Madagascar] pour promouvoir le développement des relations d’amitié et de coopération pour le grand bénéfice des deux peuples. » (20 janvier 2014).
Le Secrétaire Général de la Francophonie, Abdou Diouf, s’est déclaré confiant le 22 janvier 2014 sur le sens des responsabilités de l’ensemble de la classe politique malgache pour reconnaître la souveraineté de l’expression du suffrage par le peuple.
Enfin, le Centre Carter, qui a été observateur durant le processus électoral, a insisté sur l’importance d’une réconciliation nationale, dans un communiqué le 22 janvier 2014 : « Le Centre invite toutes les parties prenantes à dépasser l’histoire politique du pays définie par la domination omnipotente du gagnant. ».
Rajaonarimampianina
Les premières déclarations de Hery Rajaonarimampianina sont assez encourageantes même si seuls les actes vont compter : « J’appelle à l’entraide et à la solidarité de tous pour reconstruire le pays. » (il a ainsi reconnu que le pays était détruit par la transition) et il a annoncé « travailler à l’amélioration des conditions sociales de la populaire, restaurer l’État de droit, et bien sûr la relance économique » (17 janvier 2014).
Lors d’un déplacement dans le district d’Avaradrano le 20 janvier 2014, il a réaffirmé que ses priorités seraient la reconstruction, la réconciliation et l’unité nationale, et a laissé entendre qu’il pourrait réaliser une "ouverture" politique avec l’ensemble des forces politiques du pays.
Un membre du comité d’organisation, Norbert Lala Ratsirahonana, a confié que tous les candidats à l’élection présidentielle de 2013 ont été invités ainsi que Lalao Ravalomanana, l’épouse de l’ancien Président.Les personnes qui assisteront à la cérémonie seront fouillées à l’entrée par les forces de l’ordre pour éviter tout incident.
Quelques dirigeants étrangers, cela signifie que ne sont pour l’instant attendus que quatre chefs d’État, à savoir James Michel (Président de la République des Seychelles), Hifikepunye Pohamba (Président de la République de Namibie et Président de la Troïka de la SADC), Kailash Purryag (Président de la République de Maurice) et Ikililou Dhoinine (Président de l’Union des Comores).
La France, elle, ne s’honore pas beaucoup en ayant décidé le 21 janvier 2014 de n’envoyer qu’une simple sous-ministre sans éclat, la (très incompétente) Ministre déléguée chargée de la Francophonie, Yamina Benguigui, dont la venue a déjà suscité l’ironie dans des forums malgaches (par exemple, ce type de réflexion : « La bobo socialo de service ! Franchement ! Ça montre le peu de considération de Guimauve le conquérant envers Madagascar ! Pourquoi pas Nicolas Bedos ou Ruquier pendant qu’il y est ? (…) Dans la hiérarchie protocolaire, c’est pas top-top. Il aurait dû envoyer Julie Gayet… Là on aurait su qu’il prenait Madagascar au sérieux ! »). Initialement, c’était le Ministre écologiste délégué chargé du Développement, Pascal Canfin, qui avait été attendu.
Parmi les autres délégations étrangères, le Japon sera représenté par Ishihara Hirotaka, vice-Ministre japonais des Affaires étrangères.
Revenons à la chronologie de ces derniers jours
Le 3 janvier 2014, la Commission électorale nationale indépendante pour la transition (CENIT) avait proclamé Hery Rajaonarimampianina élu avec 53,50% à l’élection présidentielle dont le second tour s’était tenu le 20 décembre 2013. Son rival malheureux Jean-Louis Robinson avait fortement contesté ces résultats en parlant de fraude massive et estimait dès le lendemain qu’il avait les preuves que les résultats étaient inversés, en revendiquant 52,87% des suffrages à son profit.
Cependant, ce fut sans surprise que la Cour électorale spéciale (CES), plus haute instance officielle, a rejeté les supposées preuves présentées par ce candidat et a confirmé définitivement le 17 janvier 2014 vers onze heures l’élection de Hery Rajaonarimampianina en lui retirant néanmoins 0,01% des suffrages proclamés deux semaines avant.
Les résultats définitifs
Les résultats définitifs du second tour de l’élection présidentielle du 20 décembre 2013 sont donc les suivants.
Inscrits : 7 971 790 électeurs.
Votants : 4 043 246 inscrits (50,72%).
Blancs et nuls : 191 786.
Suffrages exprimés : 3 851 460.
Hery Rajaonarimampianina : 2 060124 voix (53,49%) élu.
Jean-Louis Robinson : 1 791 336 voix (46,61%) battu.
La participation, si elle est plus de 10% plus faible qu’au premier tour, elle reste cependant élevée compte tenu de l’histoire malgache (les précédentes élections) et de sa géographie au moment de la saison des pluies (dans certaines zones très reculées), et compte tenu aussi que le duel final n’avait pas enthousiasmé beaucoup les foules puisque cela revenait à un duel par procuration entre Marc Ravalomanana (le Président destitué) et Andry Rajoelina (l’auteur du putsch du 17 mars 2009).
L’écart entre les deux candidats reste d’ailleurs faible (moins de 270 000 voix) quand on regarde l’historique électoral de Madagascar. Que ce scrutin avec ces résultats définitifs soit sincère ou pas, il sera toujours très difficile de l’apprécier. Dans tous les cas, la page est maintenant tournée.
Une élection reconnue à l’intérieur…
Le fait est que non seulement Hery Rajaonarimampianina a été déclaré officiellement élu par une instance qui était reconnue de tous les candidats, mais la plupart des anciens candidats du premier tour ont également reconnu cette élection, ainsi que la plupart des pays étrangers.
Ainsi, les réactions de reconnaissance sont très nombreuses. Le Premier Ministre malgache, Jean Omer Beriziky, en déplacement à Genève le 18 janvier 2014, a exhorté le peuple malgache de garder son calme, d’avoir confiance et d’accepter le résultat de la CES.
Le parti écologistes de Sarah Georget (qui fut candidate au premier tour de la présidentielle et qui a soutenu au second tour Jean-Louis Robinson) a reconnu l’élection en saluant le 20 janvier 2014 « sincèrement et respectueusement le nouveau Président de la République Malagasy ».
Un autre parti qui avait soutenu Jean-Louis Robinson, Hrad Iloafo, a également reconnu l’élection de Hery Rajaonarimampianina le 21 janvier 2014.
Et à l’extérieur
Du côté français, l’ambassadeur de France à Madagascar, François Goldblatt, a déclaré : « Ce verdict consacre l’aboutissement du processus de restauration de la démocratie que le peuple malgache attendait depuis si longtemps. » (17 janvier 2014). Dans la soirée, c’est le Ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, qui a confirmé : « (…) La France adresse ses félicitations et ses vœux de réussite au Président élu, Hery Rajaonarimampianina. Cette élection (…) doit marquer pour Madagascar un nouveau départ après la longue crise politique et institutionnelle que le pays a connu. La France rend hommage aux partenaires de la communauté internationale qui ont permis la tenue de cette élection. » (17 janvier 2014).
Les félicitations du Président français François Hollande ne sont parvenus que le lendemain par une lettre à Hery Rajaonarimampianina : « Ces élections viennent clore près de cinq années de crise politique et institutionnelle. Votre élection, au terme d’un processus électoral dont la crédibilité a été saluée par l’ensemble des observateurs ouvre un nouveau chapitre de l’histoire de Madagascar. » (rendue publique le 19 janvier 2014).
L’ambassadeur de l’Union Européenne, Leondias Tzapisdis était également sur la même longueur d’onde : « Je ne peux que saluer cette nouvelle et très importante étape. » (17 janvier 2014). La Haute représentante des affaires étrangères de l’Union Européenne, Catherine Ashton, a invité le 20 janvier 2014 « le Président élu et toutes les parties prenantes au processus électoral à la retenue et au respect des procédures juridiques établies dans le cadre de ce processus » et les a encouragés « à faire preuve d’esprit d’ouverture et de réconciliation dans la mise en place des nouvelles institutions issues des élections qui consacrera le retour de Madagascar à l’ordre constitutionnel, permettant ainsi la normalisation de ses relations avec l’Union Européenne ».
Le Secrétaire Général de l’ONU, Ban Ki-moon « appelle le nouveau gouvernement à tendre la main à l’opposition et à diriger le pays dans l’intérêt de tous ses citoyens. Il encourage les dirigeants politiques et les institutions étatiques à travailler ensemble pour arriver à une véritable réconciliation, à l’approfondissement de la gouvernance démocratique et à la reprise économique. Les Nations Unies continueront leur soutien au développement et au progrès démocratique à Madagascar. » (19 janvier 2014).
La Commission de l’Océan Indien (COI), qui sera présidée par Madagascar en début avril 2014 (la décision a été prise le 21 janvier 2014), a elle aussi été soulagée : « Cette investiture sera une bouffée d’oxygène pour tous les Malgaches et pour toute l’Indianocéanie. » (17 janvier 2014). Tout comme la Présidente de la Commission de l’Union africaine Dlamini-Zuma qui a encouragé les Malgaches a gardé leur sens des responsabilités pour consolider les progrès remarquables qui ont été accomplis et qui a demandé aux partenaires financiers internationaux d’accompagner le pays dans son effort de relance économique (19 janvier 2014).
L’ambassadeur des États-Unis à Madagascar a également salué le 19 janvier 2014 la proclamation des résultats définitifs et a félicité les autorités pour l’organisation du scrutin. Le même jour, le Ministre japonais des Affaires étrangères faisait part de la même impression : « Le Japon souhaite vivement que ces résultats seront acceptés par toutes les parties prenantes malgaches et l’ensemble de la communauté internationale, et que l’instauration de l’ordre constitutionnel sera pacifiquement réalisée dans les meilleurs délai.s » (19 janvier 2014).
Le Président de Djibouti, Ismail Omar Guelleh, a émis « le vœu d’un prompt retour à la croissance économique » à Madagascar (20 janvier 2014). Le porte-parole du Ministère chinois des Affaires étrangères, Hong Lei, a déclaré de son côté : « La Chine espère que cette élection permettra à Madagascar de mettre fin à la crise politique actuelle et que le pays pourra maintenir la stabilité et le développement. » et a précisé : « La sortie de crise de Madagascar créera des conditions favorables à l’élargissement de la coopération entre nos deux pays dans divers domaines. (…) [La Chine] entend travailler de concert avec [Madagascar] pour promouvoir le développement des relations d’amitié et de coopération pour le grand bénéfice des deux peuples. » (20 janvier 2014).
Le Secrétaire Général de la Francophonie, Abdou Diouf, s’est déclaré confiant le 22 janvier 2014 sur le sens des responsabilités de l’ensemble de la classe politique malgache pour reconnaître la souveraineté de l’expression du suffrage par le peuple.
Enfin, le Centre Carter, qui a été observateur durant le processus électoral, a insisté sur l’importance d’une réconciliation nationale, dans un communiqué le 22 janvier 2014 : « Le Centre invite toutes les parties prenantes à dépasser l’histoire politique du pays définie par la domination omnipotente du gagnant. ».
Rajaonarimampianina
Les premières déclarations de Hery Rajaonarimampianina sont assez encourageantes même si seuls les actes vont compter : « J’appelle à l’entraide et à la solidarité de tous pour reconstruire le pays. » (il a ainsi reconnu que le pays était détruit par la transition) et il a annoncé « travailler à l’amélioration des conditions sociales de la populaire, restaurer l’État de droit, et bien sûr la relance économique » (17 janvier 2014).
Lors d’un déplacement dans le district d’Avaradrano le 20 janvier 2014, il a réaffirmé que ses priorités seraient la reconstruction, la réconciliation et l’unité nationale, et a laissé entendre qu’il pourrait réaliser une "ouverture" politique avec l’ensemble des forces politiques du pays.
Dans une interview à RFI le 22 janvier 2014, Hery Rajaonarimampianina a affirmé vouloir rétablir la confiance entre la population et ses dirigeants : « C’est ça qui manquait, donc moi, je pense que c’est le socle de toute chose. Dès que l’État de droit sera mis en place, je suis tout à fait convaincu que ces genres de phénomène [comme les trafics de bois de rose] vont vite se dissiper. ».
Robinson
Son concurrent Jean-Louis Robinson, lui, a continué à contester ces résultats : « J’ai respecté toutes les règles, les textes en vigueur, toutes les instances, la Feuille de route, et mon adversaire. Aujourd’hui, la Cour électorale spéciale vient de piétiner la démocratie. Mais je ne baisserai pas les bras pour autant. » (17 janvier 2014 sur sa page Facebook), en précisant : « Nous contestons ces résultats car aucune de nos requêtes n’a été reçue. La Cour a avancé qu’il n’y avait pas eu de preuves pour nos requêtes en ce qui concerne les irrégularités dans l’organisation des élections alors qu’effectivement nous en avions fourni. ».
Le samedi 18 janvier 2014, Jean-Louis Robinson a organisé un rassemblement au Magro à Behoririka où il y a eu très peu de violence et au cours duquel il a déclaré : « Ce n’est pas encore le moment de descendre dans les rues. ». Il a en effet soupçonné l’entrisme de quelques mercenaires pour décrédibiliser le mouvement de contestation.
Le 22 janvier 2014 les rumeurs d’un retour de l’ancien Président Marc Ravalomanana à Madagascar le 25 janvier 2014 ont été immédiatement démenties par ses proches : « Un tel projet ne figure pas à l’ordre du jour » (Guy Rivo Randrianarisoa) et les partisans de Marc Ravalomanana ont fait savoir que son retour ne pourrait se faire que dans la légalité et dans le cadre de la Feuille de route.
Quel sera le nouveau Premier Ministre ?
Comme l’ont insisté surtout les représentants de l’Union Européenne, le processus électoral n’est pas encore terminé à Madagascar car il faut encore attendre que la CES proclame les résultats définitifs des élections législatives qui avaient eu lieu en même temps que le second tour de l’élection présidentielle le 20 décembre 2013. Cette proclamation devrait se tenir avant le 10 février 2014. Par ailleurs, des élections communales auront lieu le 15 avril 2014.
La CENIT avait déjà proclamé le 10 janvier 2014 les résultats provisoires des élections législatives. 2054 candidats aux législatives étaient en lice pour l’élection des 151 députés. D’après ces résultats, le mouvement émanant d’Andry Rajoelina (le MAPAR) obtiendrait la majorité relative avec 51 à 53 sièges (soit seulement un tiers de la chambre) suivi d’un groupe d’indépendants, puis, seulement en troisième position, de la mouvance Ravalomanana (les résultats affichés par la CENIT le 10 janvier 2014 sont peu exploitables).
Cela signifie que selon la procédure constitutionnelle (article 54 de la Constitution), ce sera le mouvement d’Andry Rajoelina qui proposera le nom du futur Premier Ministre nommé par Hery Rajaonarimampianina. Dans tous les cas, la mouvance Ravalomanana est la grande perdante de ces élections. Lors de l’inauguration de l’Hôpitaly manara-penitra à Andohatapenaka, le 22 janvier 2014, Andry Rajoelina expliquait doctement : « Si le nouveau Président me sollicite, je suis prêt à collaborer avec lui, si l’on ne veut pas de mes services, j’ai déjà d’autres projets. ».
Si jamais Andry Rajoelina, dans un scénario à la russe, était nommé Premier Ministre, ce serait une grave erreur et tous les espoirs de réconciliation nationale partiraient en fumée.
Hery Rajaonarimampianina a dit à ce sujet le 22 janvier 2014 sur RFI : « La publication définitive des membres qui seront élus n’est pas encore faite, jusqu’à aujourd’hui. Donc, moi, je préfère vraiment attendre cette publication définitive par la Cour électorale spéciale et à ce moment-là, on verra la configuration des rapports de force. (…) On peut tout imaginer, mais c’est le Président qui décide. Je vais décider pour le bien du pays. ».
Tout repose sur un seul homme
Visiblement, le mouvement de contestation électorale ne semble pas soutenu par la population qui préfère la mise en place rapide d’un pouvoir enfin stable et reconnu par les instances internationales pour pouvoir recommencer à obtenir des aides financières et faire redémarrer l’économie du pays.
C’est ce qui distingue cette situation de la situation du premier semstre 2002 où le différend électoral entre Didier Ratsiraka et Marc Ravalomanana s’était terminé dans un bain de sang et six mois de paralysie généralisée du pays.
Aujourd’hui, Hery Rajaonarimampianina jouit d’un état de grâce exceptionnel pour prendre les décisions utiles à son pays afin de se réconcilier et dépasser les mésententes du passé. Pour cela, seul un gouvernement d’union nationale donnera cette cohérence et ce crédit de ne pas chercher à gouverner avec un esprit partisan. La fenêtre des possibles est courte. Espérons qu’elle sera utilisée à bon escient.
Sylvain Rakotoarison
http://www.rakotoarison.eu