Ils se sont montrés paranoïaques, mégalomaniaques ou autoritaires. Portraits de dix dirigeants dans leurs œuvres. L’Afrique a connu des c...
Ils se sont montrés paranoïaques, mégalomaniaques ou autoritaires. Portraits de dix dirigeants dans leurs œuvres.
L’Afrique a connu des chefs d’Etat aux profils et aux personnalités les plus divers au cours de son histoire récente.Peu ont brillé par leur intelligence politique ou leur sens du devoir et beaucoup par leurs travers.
Certains se sont particulièrement distingués par leurs comportements loufoques ou ubuesques et d’autres par leurs pratiques mégalomaniaques.
Abdoulaye Wade, l’ex du Sénégal
Bien des Sénégalais l’avouent à contrecœur, Gorgui (le vieux en wolof), leur manque. Depuis que l’ex-président officiellement âgé de 86 ans, a quitté le pouvoir en mars 2012, la vie politique sénégalaise paraît bien terne. Son successeur Macky Sall est fréquemment comparé à François Hollande, consensuel au point d’en devenir parfois ennuyeux.
Pendant douze ans de règne, celui qui se définit en toute modestie comme «l’Africain le plus diplômé du Cap au Caire» a abreuvé les médias de déclarations plus fracassantes les unes que les autres.
Les Sénégalais aimaient à le comparer à un autre avocat d’affaires tout aussi turbulent, Nicolas Sarkozy. Mais Wade préférait se mesurer à François Mitterrand dont il avait étudié toute la carrière allant jusqu’à imiter sa gestuelle de monarque républicain.
La longue traversée du désert du natif de Jarnac avait fini par persuader Wade qu’il pourrait lui aussi arriver un jour au pouvoir, malgré son grand âge et son long exil en France, la mère patrie de son épouse Viviane.
Outre les joutes politiques, Abdoulaye Wade possède une passion dévorante: donner des leçons à tout le monde. Il assénait même des cours d’économie à des prix Nobel… d’économie.
Pourtant, le pays qu’il dirigeait n’est guère un modèle de rigueur budgétaire. Le Sénégal est l’un des pays africains qui a le plus bénéficié de l’aide au développement sans que la pauvreté ne diminue. Les diplomates étrangers ont même inventé une formule poétique pour évoquer l’argent détourné: le coefficient d’évaporation.
Si le «coefficient d’évaporation» ne dépasse pas les 15%, ils ne jugent pas nécessaire de s’inquiéter. La situation est alors jugée normale. Sous le règne d’Abdoulaye Wade le «coefficient d’évaporation» aurait eu tendance à s’envoler, au dire de nombreux diplomates, pressés de voir le très libéral Gorgui prendre sa retraite.
Symbole des errances du régime, la statue de la renaissance construite par Wade. Une «arlésienne» qui a coûté 15 milliards de francs CFA (environ 24 millions d’euros), en plus de 27 hectares de terres situées autour de l’aéroport Léopold Sédar Senghor allouées à un homme d’affaires.
Et cerise sur le gâteau: Abdoulaye Wade déclarait devoir récupérer 35% des royalties que générerait le colosse en bronze au titre de droit d’auteur. Une thèse contestée par le sculpteur Ousmane Sow.
Prodigue avec l’argent de l’Etat, Abdoulaye Wade n’hésitait pas à distribuer les deniers publics aux marabouts, aux lutteurs et à tous ceux qui se montraient prêts à jouer les griots.
Afin de se faire élire en 2000 Gorgui n’avait pas hésité à promettre d’inventer une machine à faire le mafé (plat sénégalais). Il avait aussi promis d’installer des TGV et des centrales nucléaires au Sénégal.
Il promettait aussi un emploi pour tous. En plaisantant, les Sénégalais affirment que les seuls jeunes avec lesquels il a tenu cette promesse sont son fils Karim et sa fille Syndiely.
La machine à mafé ? Une idée à laquelle il était sans doute le seul à croire. Mais comme il était intimement persuadé de sa supériorité intellectuelle sur le reste du peuple sénégalais, le fait d’être le seul à partager une opinion ne l’a jamais gêné.
Alors que son fils Karim est dans le collimateur de la justice, le facétieux Wade n’hésite pas à avouer qu’il a donné de l’argent à son héritier. Mais Wade ajoute aussi qu’il en a beaucoup donné à…Macky Sall, son successeur à la tête de l’Etat et celui qu’il suspecte de vouloir jeter son fils en prison.
Malgré sa défaite cuisante de mars 2012, Wade n’est pas décidé à prendre sa retraite. A ceux qui le disent à l’article de la mort, il répond tout de go: «Je vous enterrerai tous».
Il dirigeait toujours le PDS (Parti démocratique sénégalais) lors des législatives de juillet 2012. A cette occasion, le fondateur du PDS avait fustigé l’un des ses ex lieutenants, l’accusant d’avoir «importé» des albinos du Mali afin de procéder à des sacrifices humains.
Selon Wade, son ex-lieutenant comptait ainsi gagner les législatives. On vous le dit, avec maître Wade, l’ennui ne guette jamais.
Sani Abacha, le «big brother» gendarme de l’Afrique de l’Ouest
Le président Sani Abacha qui a dirigé le Nigeria de 1993 à 1998 aura marqué son pays et toute l’Afrique de l’ouest par sa tyrannie et son pouvoir hégémonique. Dès son accession au pouvoir, il a fait substituer les institutions démocratiques par un gouvernement militaire et beaucoup de fonctionnaires civils par des militaires.
Son gouvernement était un savant dosage de militaires - pour la plupart des généraux - et d’officiers supérieurs de la police. Ce professionnel des coups d’Etat et compagnon de longue date de son prédécesseur au pouvoir Ibrahim Babangida était un obsédé du contrôle des institutions de l’Etat et des citoyens. Jamais les fameux services de renseignement nigérians dénommés « SSS » (State Security Services) n’auront été aussi actifs que sous son règne.
Sani Abacha a fait de la presse, son ennemi public numéro 1. Le patron de Tell Magazine, Onome Osifo-Whiskey en sait quelque chose. Lui qui était obligé de changer de planque continuellement pour fuir les hommes de Sani Abacha et qui a effectué plusieurs séjours en prison.
Le respect des droits de l’homme n’a jamais été la tasse de thé du «big brother». Abacha a laissé mourir en prison, Moshood Abiola, le vainqueur de la présidentielle de 1993 à la suite de l’annulation de laquelle il a pris le pouvoir. Abacha a aussi jeté en prison l’ex-président et général Olusegun Obasanjo qui, selon des sources dignes de foi, n’a eu la vie sauve que grâce à l’intervention de plusieurs chefs d’Etat africains dont le président Mathieu Kérékou du Bénin.
En 1995, le dictateur aux lunettes noires a fait pendre l’écrivain Ken Saro Wiwa et ses compagnons militants Ogoni des droits de l’homme. Serge Félix N’Piénikoua, journaliste béninois, raconte à quel point Sani Abacha était paranoïaque:
Alors que ses services de sécurité étaient déjà en place et qu’on l’attendait à Ouagadougou, l’annonce de sa mort le 8 juin 1998 avait, en effet, surpris plus d’un. Officiellement, il s’est agi d’une crise cardiaque mais selon le célèbre magazine nigérian Newswatch, il s’agirait plutôt d’un excès de Viagra trafiqué alors que le dictateur était en plein ébat avec des prostituées libanaises. Mais pour son épouse, «son mari a été tué par ses meilleurs amis».
L’un des grands mérites de ce dirigeant du Nigeria que l’histoire retiendra, au-delà de ses méthodes brutales et dictatoriales, aura été de restaurer la démocratie en Sierra Leone. A la suite du coup d’Etat du 25 mai 1997 dirigé par le lieutenant-colonel Johnny Paul Koroma contre le président démocratiquement élu Ahmad Tejan Kabbah, Sani Abacha avait envoyé des troupes nigérianes pour chasser les usurpateurs du pouvoir et réinstaller Ahmad Tejan Kabbah le 10 mars 1998.
Jean-Bedel Bokassa, l’ubuesque empereur de Centrafrique
Jean-Bedel Bokassa a terminé sa carrière avec le grade de capitaine dans l’armée coloniale française. Après les bons et loyaux services rendus à la France pendant la seconde guerre mondiale et les guerres coloniales en Indochine et en Algérie, il a choisi de rentrer dans son pays.
Le militaire, destiné dans sa jeunesse à devenir prêtre, avant que le destin n’en décide autrement, ne pouvait pas mieux tomber. Surtout quand on sait que le président de la jeune République de Centrafrique n’était alors autre que son propre cousin David Dacko.
Jean-Bedel Bokassa se voit ainsi confier par ce dernier l’organisation de l’armée et promouvoir au grade de colonel, puis à celui de chef d’Etat-major. Profitant d’une tentative de coup d’Etat qu’il était censé déjouer, il renversera le président David Dacko et s’empare du pouvoir le 31 décembre 1965.
Dès lors, celui que le général Charles de Gaulle traitait de «soudard» va se conférer la présidence à vie. Il se convertit à l’islam sous le nom de Salah Eddine Ahmed Bokassa pour s’attirer les faveurs et le soutien financier de Mouammar Kadhafi.
L’ancien «soudard» de la coloniale désormais à la tête de son pays n’a pas d’autre rêve que d’être à l’image de son idole, à savoir l’empereur Napoléon Bonaparte.
C’est dans ce contexte qu’il organisera son couronnement avec la participation du gotha politique et artistique français de l’époque. Mais contre toute attente, aucun chef d’Etat africain ne sera au rendez-vous.
Lors d’une cérémonie dont la théâtralité le dispute au faste, le 4 décembre 1977, Jean-Bedel Bokassa se fait couronner «empereur de Centrafrique» dans le même costume que Napoléon Ier. Son titre exact est:
Au total, soixante mille bouteilles de champagne et de Bourgogne coulèrent à l’occasion.
Et le moment fort de la cérémonie au palais des sports de Bangui, fut la parade du nouvel «empereur» de Centrafrique dans les rues de la capitale centrafricaine à bord d’un carrosse fait de bronze et d’or et tiré par des chevaux des haras du Pin gracieusement mis à sa disposition par le président Valéry Giscard d’Estaing.
Coût total de ce spectacle granguignolesque: cent millions de francs français dont une grande partie payée par Mouammar Kadhafi.
La dictature sanguinaire que Jean Bedel Bokassa a instaurée à son avènement au pouvoir, mais surtout la sanglante répression des manifestations des lycéens le conduira à sa chute.
Alors même qu’il est en visite en Libye, les services de renseignement français et les forces spéciales réinstallent le président David Dacko au pouvoir le 20 septembre 1979. Grâce à la fameuse opération dont le nom de code était «Barracuda». Et cela peu avant la révélation par le Canard enchaîné de l’affaire des diamants de Valéry Giscard d’Estaing.
Idi Amin Dada, le paranoïaque d’Ouganda
L’ancien cuisinier et laveur de linge devenu soldat et président d’Ouganda après son coup d’Etat du 25 janvier 1971 fait partie des chefs d’Etat de sinistre mémoire en Afrique.
Idi Amin Dada n’a pas été qu’un inculte, ubuesque et sanguinaire chef d’Etat. Il a fait pourchasser et exterminer tous ceux qui étaient supposés représenter une menace à son régime et une bonne partie des intellectuels.
De nombreux témoignages concordant attestent qu’il était adepte de certaines pratiques de sorcellerie. Sa mère ayant été une grande initiée et prêtresse de la famille royale Bouganda. Mais il est probable que les rumeurs de cannibalisme à son sujet aient été un peu exagérées.
La folie d’Idi Amin Dada ne s’arrête pas à sa décision de rester président à vie ou de s’octroyer le grade de maréchal dès 1975. Il va multiplier les frasques.
Au cours du sommet de la défunte Organisation de l’unité africaine (OUA) sur les cendres desquelles l’Union africaine est née, il fait organiser plusieurs événements burlesques.
Il s’agit, entre autres, d’une course automobile pendant laquelle il conduit une Citroën SM avec un moteur Maserati, une manœuvre militaire dirigée par lui-même pour simuler une attaque contre l’Afrique du Sud, tout comme il exposera plus tard, à grand renfort médiatique, son fameux plan de reconquête du plateau du Golan occupé par Israël.
Il n’a pas hésité à se faire balader sur une chaise portée par des hommes d’affaires occidentaux dans les rues de Kampala ou à expulser des milliers d’Indo-Pakistanais de son pays.
Le tyran de Kampala finit par sombrer dans un état psychologique inquiétant aussi bien pour son entourage que pour les partenaires étrangers.
Quand la Grande Bretagne a décidé de rompre ses relations diplomatiques avec l’Ouganda, Idi Amin Dada dira qu’il a vaincu les Britanniques. Et de se déclarer «roi d’Ecosse» et «Conquérant de l’Empire britannique».
Avant sa chute, le 11 avril 1979, son exil ensuite à Djeddah en Arabie saoudite par charité islamique, et son décès, le 16 août 2003, il se faisait appeler:
Mouammar Kadhafi, mégalomane de Libye
L’ex-président de la Libye, Mouammar Kadhafi, restera pendant longtemps encore dans la mémoire des Africains. Il aura marqué l’histoire contemporaine du continent depuis le coup d’Etat qui le porta au pouvoir en 1969.
Non pas seulement à cause de la fin tragique, le 20 octobre 2011, de celui qui traitait ses ennemis de rats. Mais aussi et surtout à cause de sa folie des grandeurs et de sa suffisance.
Pendant tout son règne, Mouammar Kadhafi ne s’est autorisé qu’une seule limite à ne pas franchir, à savoir celle de s’autoproclamer comme le seul et légitime représentant de Dieu sur terre.
Autoproclamé «leader» et «guide» des Libyens, Mouammar Kadhafi avait construit sa propre théorie de développement sur la base de laquelle il voulait voir son peuple évoluer: elle était consigné dans le fameux Livre vert.
Il s’est fait couronner «Roi des rois» africains. Et il a tout fait, sans succès, pour devenir le «président» des Etats-Unis d’Afrique. Une première étape qui devait lui permettre de faire valoir son ambition future de devenir le «maître» du monde.
En fin de compte, Mouammar Kadhafi n’aura été que le «maître» de l’Afrique noire à quelques exceptions près, distribuant prébendes par-ci et suscitant des conflits par-là pour tenir en laisse les chefs d’Etat récalcitrants.
Il se payera aussi la tête des grandes puissances occidentales en fomentant des attentats pour, par la suite, leur payer des dédommagements. L’homme était connu pour se déplacer toujours avec une armée de femmes gardes du corps et son inséparable tente de Bédouin.
Il a poussé la provocation jusque dans la capitale française où il a planté sa tente dans le parc de l’hôtel Marigny, à côté de l’Elysée, au cours de sa visite officielle sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
Yahya Jammeh, le marabout-guérisseur de Gambie
Les obligations de président de la République de Gambie ne semblent pas suffire à Yahya Jammeh.
Depuis 1994 qu’il a chassé Daouda Jawara du pouvoir à la suite d’un coup d’Etat, le jeune lieutenant s’est littéralement métamorphosé.
L’homme qui affectionne maintenant de parader avec de grands boubous africains et une baguette magique en main s’est depuis quelque temps adjoint une nouvelle vocation quasi messianique: marabout de Gambie et grand guérisseur devant l’éternel des maladies les plus incurables, y compris du Sida.
Le comble, il présente de soi-disant séropositifs qui auraient été guéris par ses soins. Sans s’émouvoir devant l’ire des représentants des institutions de l’ONU quant à ses prétendus remèdes contre la pandémie.
Plutôt que de s’occuper des vrais problèmes de ses compatriotes, le chef de l’Etat gambien n’a de cesse de multiplier des frasques.
Seyni Kountché, le cerveau gonflable du Niger
Seyni Kountché a accédé au pouvoir le 15 avril 1974 par un coup d’Etat consécutif à une longue période d’instabilité sociopolitique. Laquelle avait mis le régime du président Diori Hamani sur la sellette, aggravée par une grande sécheresse.
Une fois au pouvoir, des tentatives infructueuses de putsch vont se multiplier. Il s’agit notamment de celles du commandant Bayere Moussa, en 1975, d’Ahmed Moudour en 1976, de son marabout Bonkano en 1983. Sans compter le soutien de Mouammar Kadhafi aux rebelles touaregs contre son régime.
Face à cette situation, le régime du président Seyni Kountché va se durcir. Avec à la clé, la mise en place d’un service de renseignement puissant. Il veut que rien ne lui échappe.
Et pour cause, il concentre entre ses mains les principales institutions, ce qui lui permet de contrôler la situation dans le pays, jsque dans les moindres détails. En l’occurrence, la présidence de la République, le ministère de la Défense et le ministère de l’Intérieur.
Seyni Kountché veut être au courant de tout dans le pays, et il possède une mémoire d’éléphant. Tout lui est rapporté et il suit tout de près, jusqu’au petit détail.
Jusqu’à son décès le 10 novembre 1987 à l’hôpital de La Pitié Salpetrière à Paris, il réussira en garder totalement la main sur le pays.
Robert Mugabe, le fou du pouvoir du Zimbabwe
Le président zimbabwéen, Robert Mugabe, a joué un rôle majeur dans l’indépendance de son pays (ex-Rhodésie du Sud).
A telle enseigne qu’il en est souvent considéré à tort ou à raison comme le père de l’indépendance.
Après de longues et dures années de lutte politique et de guérilla contre le régime blanc de Rhodésie du Sud, il est arrivé à la tête de l’Etat en 1987.
Tout comme il a longtemps joué sur l’opposition entre son ethnie (les Shonas) et celle de ses adversaires (les Ndébélés), il en fera de même en opposant les Zimbabwéens blancs aux noirs.
Et il a l’art d’utiliser le communautarisme comme mode de gouvernement et de conservation du pouvoir. Un pouvoir qu’il n’entend pas quitter tant qu’il est encore en vie.
Le dernier épisode en date reste les élections législatives et la présidentielle de 2008.
Alors qu’il pouvait s’offrir une sortie historique du pouvoir et une retraite paisible, il a décidé de briguer un sixième mandat dans un contexte de grave crise économique et de tension sociopolitique.
Son stratagème: une réforme agraire qui consiste à arracher purement et simplement des terres aux blancs pour les donner aux noirs.
Mais mal lui en a pris. Cette fois-là, le surf sur les oppositions communautaristes ne marche pas face à son ex-ministre des Finances Morgan Tsvangirai, lequel a crée son propre parti, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC).
Ce dernier rafle les sièges au Parlement et gagne la présidentielle dont le résultat ne sera pas proclamé avec les 50,3% des voix qu'il a obtenus.
Conséquence: il s’en est suivi des violences postélectorales meurtrières, à caractère ethnique, contre les militants et sympathisants de Morgan Tsvangirai.
Ce qui a obligé la communauté internationale à intervenir, à travers l’ONU, pour imposer une transition bancale qui a maintenu Robert Mugabe à la tête de l’Etat et fait de Morgan Tsvangirai son Premier ministre.
Mais, même au bout de cette transition, rien ne dit a priori que le fou du pouvoir du Zimbabwe le quittera demain s’il était encore battu lors des prochaines échéances.
Moussa Traoré, la marionnette de Bamako
Moussa Traoré faisait partie des militaires qui ont renversé le régime du président Modibo Keïta, le 19 novembre 1968.
Aussitôt parvenu au pouvoir, il a mis en place un régime dictatorial au sein duquel les services de renseignement espionnaient tout le monde, y compris des lycéens.
L’arrestation et la détention de Modibo Keïta jusqu’à sa mort dans des conditions fort suspectes, en mai 1977, n’est pas sans susciter des remous dans le pays. Mais passé cet orage, le pouvoir autocratique du général Moussa Traoré s’enracine profondément.
Il faudra attendre la fin des années 1990, à la faveur des changements sociopolitiques de la fin des années 1980 pour voir de nouvelles protestations pro-démocratiques aussi fortes au Mali.
Les 20 et 21 janvier 1991, l’Union démocratique du peuple malien (UDPM), parti au pouvoir, est ébranlé.
Plusieurs mouvements, en l’occurrence l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma), le Comité national d’initiatives démocratiques (CNID), l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM), l’Association des diplômés initiateurs et demandeurs d’emplois (Adide) marchent à Bamako et dans plusieurs villes du pays.
On peut lire dans l’un des documents de l’Adéma:
Au plus fort de la crise, alors que Moussa Traoré voulait lâcher du lest, son épouse le lui aurait fermement déconseillé avec l’aile la plus dure de l’armée. Au point de lui demander s’il est un «fils de mâle» ou non.
Sous l’instigation de Mariam Traoré, il choisit le camp de l’aile dure et de répondre par la force.
Les manifestations des 22, 23 et 24 mars auxquelles l’armée réplique en tirant à vue sur les manifestants constituent des événements sans précédent dans l’histoire de toute l’Afrique de l’ouest. Pendant la seule journée du 22 mars, plus d’une centaine de personnes sont tuées.
Le 24 mars, les Africains de France signent une pétition contre cette boucherie humaine. Ainsi écrivent-ils dans le Manifeste africain pour le Mali:
La sanglante répression des manifestations pro-démocratiques de Bamako vont précipiter sa destitution, le 26 mars 1991, par Amadou Toumani Touré, qui conduira la transition démocratique du pays.
Mswati III, le roi qui se comporte en monarque absolu
Le prince Makhosetive Dlamini devenu roi du petit pays d’un million d’habitants qu’est le Swaziland sous le nom de Mswati III est manifestement un personnage ubuesque. Né le 19 avril 1968, il avait 14 ans quand son père est décédé. Il lui a donc fallu achever ses études avant d’accéder au pouvoir selon les us et coutumes du pays le 25 avril 1986. En dépit de son éducation, Mswati III dirige son pays en monarque absolu. Mswati III choisit ainsi des jeunes filles vierges pour agrandir son harem chaque fois que l’envie lui prend et compte maintenant plus de 13 femmes. Tandis que près de la moitié de son peuple est touché par le Sida, il continue de refuser l’utilisation du préservatif. De même, pendant que la majorité de son peuple vit dans le dénuement le plus total, certaines de ses épouses vont faire leur shoping à Dubaï et à Londres. A en croire le Programme alimentaire mondial (Pam), un tiers des Swazis ont besoin d’aide alimentaire. Pourtant, le roi ne se prive de rien. A l’occasion de son 40ème anniversaire qui coïncidait avec l’indépendance du pays– Mswati III a maintenant 44 ans -, il s’était fait livrer dans son palais 41 BMW. En 2012, lors de son anniversaire, il s’est vu offrir entre autres cadeaux, un jet. Cadeau de mystérieux donateurs tenant à garder l’anonymat, selon la BBC.
Au Swaziland, c’est le roi qui possède les terres les plus fertiles et le plus grand nombre de vaches. Il peut puiser sans réel contrôle dans les caisses de l’Etat aussi. Le magazine Forbes le classe au 15ème rang des fortunes royales du monde. Sa fortune est estimée à plus de 100 millions de dollars.
Pierre Cherruau etMarcus Boni Teiga
L’Afrique a connu des chefs d’Etat aux profils et aux personnalités les plus divers au cours de son histoire récente.Peu ont brillé par leur intelligence politique ou leur sens du devoir et beaucoup par leurs travers.
Certains se sont particulièrement distingués par leurs comportements loufoques ou ubuesques et d’autres par leurs pratiques mégalomaniaques.
Abdoulaye Wade, l’ex du Sénégal
Bien des Sénégalais l’avouent à contrecœur, Gorgui (le vieux en wolof), leur manque. Depuis que l’ex-président officiellement âgé de 86 ans, a quitté le pouvoir en mars 2012, la vie politique sénégalaise paraît bien terne. Son successeur Macky Sall est fréquemment comparé à François Hollande, consensuel au point d’en devenir parfois ennuyeux.
Pendant douze ans de règne, celui qui se définit en toute modestie comme «l’Africain le plus diplômé du Cap au Caire» a abreuvé les médias de déclarations plus fracassantes les unes que les autres.
Les Sénégalais aimaient à le comparer à un autre avocat d’affaires tout aussi turbulent, Nicolas Sarkozy. Mais Wade préférait se mesurer à François Mitterrand dont il avait étudié toute la carrière allant jusqu’à imiter sa gestuelle de monarque républicain.
La longue traversée du désert du natif de Jarnac avait fini par persuader Wade qu’il pourrait lui aussi arriver un jour au pouvoir, malgré son grand âge et son long exil en France, la mère patrie de son épouse Viviane.
Outre les joutes politiques, Abdoulaye Wade possède une passion dévorante: donner des leçons à tout le monde. Il assénait même des cours d’économie à des prix Nobel… d’économie.
Pourtant, le pays qu’il dirigeait n’est guère un modèle de rigueur budgétaire. Le Sénégal est l’un des pays africains qui a le plus bénéficié de l’aide au développement sans que la pauvreté ne diminue. Les diplomates étrangers ont même inventé une formule poétique pour évoquer l’argent détourné: le coefficient d’évaporation.
Si le «coefficient d’évaporation» ne dépasse pas les 15%, ils ne jugent pas nécessaire de s’inquiéter. La situation est alors jugée normale. Sous le règne d’Abdoulaye Wade le «coefficient d’évaporation» aurait eu tendance à s’envoler, au dire de nombreux diplomates, pressés de voir le très libéral Gorgui prendre sa retraite.
Symbole des errances du régime, la statue de la renaissance construite par Wade. Une «arlésienne» qui a coûté 15 milliards de francs CFA (environ 24 millions d’euros), en plus de 27 hectares de terres situées autour de l’aéroport Léopold Sédar Senghor allouées à un homme d’affaires.
Et cerise sur le gâteau: Abdoulaye Wade déclarait devoir récupérer 35% des royalties que générerait le colosse en bronze au titre de droit d’auteur. Une thèse contestée par le sculpteur Ousmane Sow.
Prodigue avec l’argent de l’Etat, Abdoulaye Wade n’hésitait pas à distribuer les deniers publics aux marabouts, aux lutteurs et à tous ceux qui se montraient prêts à jouer les griots.
Afin de se faire élire en 2000 Gorgui n’avait pas hésité à promettre d’inventer une machine à faire le mafé (plat sénégalais). Il avait aussi promis d’installer des TGV et des centrales nucléaires au Sénégal.
Il promettait aussi un emploi pour tous. En plaisantant, les Sénégalais affirment que les seuls jeunes avec lesquels il a tenu cette promesse sont son fils Karim et sa fille Syndiely.
La machine à mafé ? Une idée à laquelle il était sans doute le seul à croire. Mais comme il était intimement persuadé de sa supériorité intellectuelle sur le reste du peuple sénégalais, le fait d’être le seul à partager une opinion ne l’a jamais gêné.
Alors que son fils Karim est dans le collimateur de la justice, le facétieux Wade n’hésite pas à avouer qu’il a donné de l’argent à son héritier. Mais Wade ajoute aussi qu’il en a beaucoup donné à…Macky Sall, son successeur à la tête de l’Etat et celui qu’il suspecte de vouloir jeter son fils en prison.
Malgré sa défaite cuisante de mars 2012, Wade n’est pas décidé à prendre sa retraite. A ceux qui le disent à l’article de la mort, il répond tout de go: «Je vous enterrerai tous».
Il dirigeait toujours le PDS (Parti démocratique sénégalais) lors des législatives de juillet 2012. A cette occasion, le fondateur du PDS avait fustigé l’un des ses ex lieutenants, l’accusant d’avoir «importé» des albinos du Mali afin de procéder à des sacrifices humains.
Selon Wade, son ex-lieutenant comptait ainsi gagner les législatives. On vous le dit, avec maître Wade, l’ennui ne guette jamais.
Sani Abacha, le «big brother» gendarme de l’Afrique de l’Ouest
Le président Sani Abacha qui a dirigé le Nigeria de 1993 à 1998 aura marqué son pays et toute l’Afrique de l’ouest par sa tyrannie et son pouvoir hégémonique. Dès son accession au pouvoir, il a fait substituer les institutions démocratiques par un gouvernement militaire et beaucoup de fonctionnaires civils par des militaires.
Son gouvernement était un savant dosage de militaires - pour la plupart des généraux - et d’officiers supérieurs de la police. Ce professionnel des coups d’Etat et compagnon de longue date de son prédécesseur au pouvoir Ibrahim Babangida était un obsédé du contrôle des institutions de l’Etat et des citoyens. Jamais les fameux services de renseignement nigérians dénommés « SSS » (State Security Services) n’auront été aussi actifs que sous son règne.
Sani Abacha a fait de la presse, son ennemi public numéro 1. Le patron de Tell Magazine, Onome Osifo-Whiskey en sait quelque chose. Lui qui était obligé de changer de planque continuellement pour fuir les hommes de Sani Abacha et qui a effectué plusieurs séjours en prison.
Le respect des droits de l’homme n’a jamais été la tasse de thé du «big brother». Abacha a laissé mourir en prison, Moshood Abiola, le vainqueur de la présidentielle de 1993 à la suite de l’annulation de laquelle il a pris le pouvoir. Abacha a aussi jeté en prison l’ex-président et général Olusegun Obasanjo qui, selon des sources dignes de foi, n’a eu la vie sauve que grâce à l’intervention de plusieurs chefs d’Etat africains dont le président Mathieu Kérékou du Bénin.
En 1995, le dictateur aux lunettes noires a fait pendre l’écrivain Ken Saro Wiwa et ses compagnons militants Ogoni des droits de l’homme. Serge Félix N’Piénikoua, journaliste béninois, raconte à quel point Sani Abacha était paranoïaque:
«Lors d’un sommet de la Cedeao à Cotonou, les services de sécurité de Sani Abacha qui transportaient de gros bagages contenant des armes avaient refusé tout contrôle à l’aéroport de Cotonou. Ils ne se gênaient d’ailleurs pas pour bousculer la garde rapprochée du président Mathieu Kérékou dans le but d’assurer la sécurité de leur président. Et pendant le sommet qui se tenait dans la salle de conférence de l’hôtel Plm Alédjo à Cotonou, le ministre de l’Intérieur de l’époque, Théophile N’Dah, avait imprudemment appuyé sur un interrupteur qui avait coupé la lumière et plongé toute la salle dans l’obscurité. Le temps de le rallumer l’électricité, quelle n’avait pas été la surprise de tous les participants de constater quand la lumière fut remise que la garde rapprochée de Sani Abacha braquait déjà de gros engins de mort sur toute l’assistance, des armes qu’on avait jamais vues».Ennemi juré des Etats-Unis d’Amérique, beaucoup pensent que la mort de Sani Abacha est à mettre sur le compte de services de renseignements de pays occidentaux qui auraient infiltré ses services: une femme l’aurait empoisonné la veille d’un sommet de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao).
Alors que ses services de sécurité étaient déjà en place et qu’on l’attendait à Ouagadougou, l’annonce de sa mort le 8 juin 1998 avait, en effet, surpris plus d’un. Officiellement, il s’est agi d’une crise cardiaque mais selon le célèbre magazine nigérian Newswatch, il s’agirait plutôt d’un excès de Viagra trafiqué alors que le dictateur était en plein ébat avec des prostituées libanaises. Mais pour son épouse, «son mari a été tué par ses meilleurs amis».
L’un des grands mérites de ce dirigeant du Nigeria que l’histoire retiendra, au-delà de ses méthodes brutales et dictatoriales, aura été de restaurer la démocratie en Sierra Leone. A la suite du coup d’Etat du 25 mai 1997 dirigé par le lieutenant-colonel Johnny Paul Koroma contre le président démocratiquement élu Ahmad Tejan Kabbah, Sani Abacha avait envoyé des troupes nigérianes pour chasser les usurpateurs du pouvoir et réinstaller Ahmad Tejan Kabbah le 10 mars 1998.
Jean-Bedel Bokassa, l’ubuesque empereur de Centrafrique
Jean-Bedel Bokassa a terminé sa carrière avec le grade de capitaine dans l’armée coloniale française. Après les bons et loyaux services rendus à la France pendant la seconde guerre mondiale et les guerres coloniales en Indochine et en Algérie, il a choisi de rentrer dans son pays.
Le militaire, destiné dans sa jeunesse à devenir prêtre, avant que le destin n’en décide autrement, ne pouvait pas mieux tomber. Surtout quand on sait que le président de la jeune République de Centrafrique n’était alors autre que son propre cousin David Dacko.
Jean-Bedel Bokassa se voit ainsi confier par ce dernier l’organisation de l’armée et promouvoir au grade de colonel, puis à celui de chef d’Etat-major. Profitant d’une tentative de coup d’Etat qu’il était censé déjouer, il renversera le président David Dacko et s’empare du pouvoir le 31 décembre 1965.
Dès lors, celui que le général Charles de Gaulle traitait de «soudard» va se conférer la présidence à vie. Il se convertit à l’islam sous le nom de Salah Eddine Ahmed Bokassa pour s’attirer les faveurs et le soutien financier de Mouammar Kadhafi.
L’ancien «soudard» de la coloniale désormais à la tête de son pays n’a pas d’autre rêve que d’être à l’image de son idole, à savoir l’empereur Napoléon Bonaparte.
C’est dans ce contexte qu’il organisera son couronnement avec la participation du gotha politique et artistique français de l’époque. Mais contre toute attente, aucun chef d’Etat africain ne sera au rendez-vous.
Lors d’une cérémonie dont la théâtralité le dispute au faste, le 4 décembre 1977, Jean-Bedel Bokassa se fait couronner «empereur de Centrafrique» dans le même costume que Napoléon Ier. Son titre exact est:
«Empereur de Centrafrique par la volonté du peuple centrafricain, uni au sein du parti politique national: le Mesean (Ndlr: Mouvement pour l’évolution sociale de l’Afrique noire)».En présence de 5.000 participants dont le ministre français de la Coopération, Robert Galley, la garde-robe de Jean Bedel Bokassa, pour l'occasion, portait la griffe de Pierre Cardin, l’énorme trône celle du sculpteur Olivier Brice, la couronne en or du joaillier Claude Arthus-Bertrand avec sept mille carats de diamants.
Au total, soixante mille bouteilles de champagne et de Bourgogne coulèrent à l’occasion.
Et le moment fort de la cérémonie au palais des sports de Bangui, fut la parade du nouvel «empereur» de Centrafrique dans les rues de la capitale centrafricaine à bord d’un carrosse fait de bronze et d’or et tiré par des chevaux des haras du Pin gracieusement mis à sa disposition par le président Valéry Giscard d’Estaing.
Coût total de ce spectacle granguignolesque: cent millions de francs français dont une grande partie payée par Mouammar Kadhafi.
La dictature sanguinaire que Jean Bedel Bokassa a instaurée à son avènement au pouvoir, mais surtout la sanglante répression des manifestations des lycéens le conduira à sa chute.
Alors même qu’il est en visite en Libye, les services de renseignement français et les forces spéciales réinstallent le président David Dacko au pouvoir le 20 septembre 1979. Grâce à la fameuse opération dont le nom de code était «Barracuda». Et cela peu avant la révélation par le Canard enchaîné de l’affaire des diamants de Valéry Giscard d’Estaing.
Idi Amin Dada, le paranoïaque d’Ouganda
L’ancien cuisinier et laveur de linge devenu soldat et président d’Ouganda après son coup d’Etat du 25 janvier 1971 fait partie des chefs d’Etat de sinistre mémoire en Afrique.
Idi Amin Dada n’a pas été qu’un inculte, ubuesque et sanguinaire chef d’Etat. Il a fait pourchasser et exterminer tous ceux qui étaient supposés représenter une menace à son régime et une bonne partie des intellectuels.
De nombreux témoignages concordant attestent qu’il était adepte de certaines pratiques de sorcellerie. Sa mère ayant été une grande initiée et prêtresse de la famille royale Bouganda. Mais il est probable que les rumeurs de cannibalisme à son sujet aient été un peu exagérées.
La folie d’Idi Amin Dada ne s’arrête pas à sa décision de rester président à vie ou de s’octroyer le grade de maréchal dès 1975. Il va multiplier les frasques.
Au cours du sommet de la défunte Organisation de l’unité africaine (OUA) sur les cendres desquelles l’Union africaine est née, il fait organiser plusieurs événements burlesques.
Il s’agit, entre autres, d’une course automobile pendant laquelle il conduit une Citroën SM avec un moteur Maserati, une manœuvre militaire dirigée par lui-même pour simuler une attaque contre l’Afrique du Sud, tout comme il exposera plus tard, à grand renfort médiatique, son fameux plan de reconquête du plateau du Golan occupé par Israël.
Il n’a pas hésité à se faire balader sur une chaise portée par des hommes d’affaires occidentaux dans les rues de Kampala ou à expulser des milliers d’Indo-Pakistanais de son pays.
Le tyran de Kampala finit par sombrer dans un état psychologique inquiétant aussi bien pour son entourage que pour les partenaires étrangers.
Quand la Grande Bretagne a décidé de rompre ses relations diplomatiques avec l’Ouganda, Idi Amin Dada dira qu’il a vaincu les Britanniques. Et de se déclarer «roi d’Ecosse» et «Conquérant de l’Empire britannique».
Avant sa chute, le 11 avril 1979, son exil ensuite à Djeddah en Arabie saoudite par charité islamique, et son décès, le 16 août 2003, il se faisait appeler:
«Son Excellence, le président à vie, maréchal Alhadji docteur Idi Amin Dada, titulaire de la Victoria Cross, DSO, titulaire de la Military Cross et Conquérant de l’Empire britannique».
Mouammar Kadhafi, mégalomane de Libye
Kadhafi au 40ème anniversaire de sa prise de pouvoir, Tripoli, 1er sept. 2009, REUTERS/Z. Bensemra.
L’ex-président de la Libye, Mouammar Kadhafi, restera pendant longtemps encore dans la mémoire des Africains. Il aura marqué l’histoire contemporaine du continent depuis le coup d’Etat qui le porta au pouvoir en 1969.
Non pas seulement à cause de la fin tragique, le 20 octobre 2011, de celui qui traitait ses ennemis de rats. Mais aussi et surtout à cause de sa folie des grandeurs et de sa suffisance.
Pendant tout son règne, Mouammar Kadhafi ne s’est autorisé qu’une seule limite à ne pas franchir, à savoir celle de s’autoproclamer comme le seul et légitime représentant de Dieu sur terre.
Autoproclamé «leader» et «guide» des Libyens, Mouammar Kadhafi avait construit sa propre théorie de développement sur la base de laquelle il voulait voir son peuple évoluer: elle était consigné dans le fameux Livre vert.
Il s’est fait couronner «Roi des rois» africains. Et il a tout fait, sans succès, pour devenir le «président» des Etats-Unis d’Afrique. Une première étape qui devait lui permettre de faire valoir son ambition future de devenir le «maître» du monde.
En fin de compte, Mouammar Kadhafi n’aura été que le «maître» de l’Afrique noire à quelques exceptions près, distribuant prébendes par-ci et suscitant des conflits par-là pour tenir en laisse les chefs d’Etat récalcitrants.
Il se payera aussi la tête des grandes puissances occidentales en fomentant des attentats pour, par la suite, leur payer des dédommagements. L’homme était connu pour se déplacer toujours avec une armée de femmes gardes du corps et son inséparable tente de Bédouin.
Il a poussé la provocation jusque dans la capitale française où il a planté sa tente dans le parc de l’hôtel Marigny, à côté de l’Elysée, au cours de sa visite officielle sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
Yahya Jammeh, le marabout-guérisseur de Gambie
Les obligations de président de la République de Gambie ne semblent pas suffire à Yahya Jammeh.
Depuis 1994 qu’il a chassé Daouda Jawara du pouvoir à la suite d’un coup d’Etat, le jeune lieutenant s’est littéralement métamorphosé.
L’homme qui affectionne maintenant de parader avec de grands boubous africains et une baguette magique en main s’est depuis quelque temps adjoint une nouvelle vocation quasi messianique: marabout de Gambie et grand guérisseur devant l’éternel des maladies les plus incurables, y compris du Sida.
Le comble, il présente de soi-disant séropositifs qui auraient été guéris par ses soins. Sans s’émouvoir devant l’ire des représentants des institutions de l’ONU quant à ses prétendus remèdes contre la pandémie.
Plutôt que de s’occuper des vrais problèmes de ses compatriotes, le chef de l’Etat gambien n’a de cesse de multiplier des frasques.
Seyni Kountché, le cerveau gonflable du Niger
François Mitterrand et Seyni Kountché à Niamey, 20 Mai 1982, AFP/Philippe Bouchon.
Seyni Kountché a accédé au pouvoir le 15 avril 1974 par un coup d’Etat consécutif à une longue période d’instabilité sociopolitique. Laquelle avait mis le régime du président Diori Hamani sur la sellette, aggravée par une grande sécheresse.
Une fois au pouvoir, des tentatives infructueuses de putsch vont se multiplier. Il s’agit notamment de celles du commandant Bayere Moussa, en 1975, d’Ahmed Moudour en 1976, de son marabout Bonkano en 1983. Sans compter le soutien de Mouammar Kadhafi aux rebelles touaregs contre son régime.
Face à cette situation, le régime du président Seyni Kountché va se durcir. Avec à la clé, la mise en place d’un service de renseignement puissant. Il veut que rien ne lui échappe.
Et pour cause, il concentre entre ses mains les principales institutions, ce qui lui permet de contrôler la situation dans le pays, jsque dans les moindres détails. En l’occurrence, la présidence de la République, le ministère de la Défense et le ministère de l’Intérieur.
Seyni Kountché veut être au courant de tout dans le pays, et il possède une mémoire d’éléphant. Tout lui est rapporté et il suit tout de près, jusqu’au petit détail.
Jusqu’à son décès le 10 novembre 1987 à l’hôpital de La Pitié Salpetrière à Paris, il réussira en garder totalement la main sur le pays.
Robert Mugabe, le fou du pouvoir du Zimbabwe
Le président zimbabwéen, Robert Mugabe, a joué un rôle majeur dans l’indépendance de son pays (ex-Rhodésie du Sud).
A telle enseigne qu’il en est souvent considéré à tort ou à raison comme le père de l’indépendance.
Après de longues et dures années de lutte politique et de guérilla contre le régime blanc de Rhodésie du Sud, il est arrivé à la tête de l’Etat en 1987.
Tout comme il a longtemps joué sur l’opposition entre son ethnie (les Shonas) et celle de ses adversaires (les Ndébélés), il en fera de même en opposant les Zimbabwéens blancs aux noirs.
Et il a l’art d’utiliser le communautarisme comme mode de gouvernement et de conservation du pouvoir. Un pouvoir qu’il n’entend pas quitter tant qu’il est encore en vie.
Le dernier épisode en date reste les élections législatives et la présidentielle de 2008.
Alors qu’il pouvait s’offrir une sortie historique du pouvoir et une retraite paisible, il a décidé de briguer un sixième mandat dans un contexte de grave crise économique et de tension sociopolitique.
Son stratagème: une réforme agraire qui consiste à arracher purement et simplement des terres aux blancs pour les donner aux noirs.
Mais mal lui en a pris. Cette fois-là, le surf sur les oppositions communautaristes ne marche pas face à son ex-ministre des Finances Morgan Tsvangirai, lequel a crée son propre parti, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC).
Ce dernier rafle les sièges au Parlement et gagne la présidentielle dont le résultat ne sera pas proclamé avec les 50,3% des voix qu'il a obtenus.
Conséquence: il s’en est suivi des violences postélectorales meurtrières, à caractère ethnique, contre les militants et sympathisants de Morgan Tsvangirai.
Ce qui a obligé la communauté internationale à intervenir, à travers l’ONU, pour imposer une transition bancale qui a maintenu Robert Mugabe à la tête de l’Etat et fait de Morgan Tsvangirai son Premier ministre.
Mais, même au bout de cette transition, rien ne dit a priori que le fou du pouvoir du Zimbabwe le quittera demain s’il était encore battu lors des prochaines échéances.
Moussa Traoré, la marionnette de Bamako
Moussa Traoré faisait partie des militaires qui ont renversé le régime du président Modibo Keïta, le 19 novembre 1968.
Aussitôt parvenu au pouvoir, il a mis en place un régime dictatorial au sein duquel les services de renseignement espionnaient tout le monde, y compris des lycéens.
L’arrestation et la détention de Modibo Keïta jusqu’à sa mort dans des conditions fort suspectes, en mai 1977, n’est pas sans susciter des remous dans le pays. Mais passé cet orage, le pouvoir autocratique du général Moussa Traoré s’enracine profondément.
Il faudra attendre la fin des années 1990, à la faveur des changements sociopolitiques de la fin des années 1980 pour voir de nouvelles protestations pro-démocratiques aussi fortes au Mali.
Les 20 et 21 janvier 1991, l’Union démocratique du peuple malien (UDPM), parti au pouvoir, est ébranlé.
Plusieurs mouvements, en l’occurrence l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma), le Comité national d’initiatives démocratiques (CNID), l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM), l’Association des diplômés initiateurs et demandeurs d’emplois (Adide) marchent à Bamako et dans plusieurs villes du pays.
On peut lire dans l’un des documents de l’Adéma:
«Divers dans ses opinions et croyances, multiples dans ses inspirations politiques et idéologiques, mais unifiés dans ses revendications de libertés publiques et individuelles, le mouvement en cours proclame les vertus de la démocratie pluraliste et réclame l’instauration du multipartisme au Mali.»Le régime désemparé face à la soudaineté et la détermination des manifestations de contestation est partagé en les faucons et les colombes.
Au plus fort de la crise, alors que Moussa Traoré voulait lâcher du lest, son épouse le lui aurait fermement déconseillé avec l’aile la plus dure de l’armée. Au point de lui demander s’il est un «fils de mâle» ou non.
Sous l’instigation de Mariam Traoré, il choisit le camp de l’aile dure et de répondre par la force.
Les manifestations des 22, 23 et 24 mars auxquelles l’armée réplique en tirant à vue sur les manifestants constituent des événements sans précédent dans l’histoire de toute l’Afrique de l’ouest. Pendant la seule journée du 22 mars, plus d’une centaine de personnes sont tuées.
Le 24 mars, les Africains de France signent une pétition contre cette boucherie humaine. Ainsi écrivent-ils dans le Manifeste africain pour le Mali:
«Africains résidant en Europe, venus de tous les horizons de notre continent, solidaires dans la diversité de nos cultures, nous tenons à exprimer de la manière la plus vigoureuse notre horreur mais aussi notre honte devant une telle infamie délibérée, sans précédent».A Bamako, ils sont légion à penser que la réaction du pouvoir devant la crise n’a pas pu émaner directement du chef de l’Etat, mais plutôt de son épouse.
La sanglante répression des manifestations pro-démocratiques de Bamako vont précipiter sa destitution, le 26 mars 1991, par Amadou Toumani Touré, qui conduira la transition démocratique du pays.
Mswati III, le roi qui se comporte en monarque absolu
Le prince Makhosetive Dlamini devenu roi du petit pays d’un million d’habitants qu’est le Swaziland sous le nom de Mswati III est manifestement un personnage ubuesque. Né le 19 avril 1968, il avait 14 ans quand son père est décédé. Il lui a donc fallu achever ses études avant d’accéder au pouvoir selon les us et coutumes du pays le 25 avril 1986. En dépit de son éducation, Mswati III dirige son pays en monarque absolu. Mswati III choisit ainsi des jeunes filles vierges pour agrandir son harem chaque fois que l’envie lui prend et compte maintenant plus de 13 femmes. Tandis que près de la moitié de son peuple est touché par le Sida, il continue de refuser l’utilisation du préservatif. De même, pendant que la majorité de son peuple vit dans le dénuement le plus total, certaines de ses épouses vont faire leur shoping à Dubaï et à Londres. A en croire le Programme alimentaire mondial (Pam), un tiers des Swazis ont besoin d’aide alimentaire. Pourtant, le roi ne se prive de rien. A l’occasion de son 40ème anniversaire qui coïncidait avec l’indépendance du pays– Mswati III a maintenant 44 ans -, il s’était fait livrer dans son palais 41 BMW. En 2012, lors de son anniversaire, il s’est vu offrir entre autres cadeaux, un jet. Cadeau de mystérieux donateurs tenant à garder l’anonymat, selon la BBC.
Au Swaziland, c’est le roi qui possède les terres les plus fertiles et le plus grand nombre de vaches. Il peut puiser sans réel contrôle dans les caisses de l’Etat aussi. Le magazine Forbes le classe au 15ème rang des fortunes royales du monde. Sa fortune est estimée à plus de 100 millions de dollars.
Pierre Cherruau etMarcus Boni Teiga