(Crédits photo: G.M. Andrews/AP) VIDÉO - Après une nouvelle attaque de surfeur, la Réunion a décidé de capturer une vingtaine de requins. ...
(Crédits photo: G.M. Andrews/AP)VIDÉO - Après une nouvelle attaque de surfeur, la Réunion a décidé de capturer une vingtaine de requins. Pour régler le problème, d'autres pays ont essayé différentes méthodes, avec plus ou moins de résultats.Faut-il tuer les requins pour empêcher les agressions de surfeurs? Alors qu'un surfeur a été blessé dimanche lors d'une attaque à Saint-Leu, au large de La Réunion, la question des moyens à mettre en œuvre pour éviter les accidents se pose de nouveau avec acuité. Le département français d'outre-mer situé dans l'océan Indien a en effet connu ces derniers mois une recrudescence des agressions de requin: huit, dont trois mortelles contre des surfeurs, ont été enregistrées depuis une vingtaine de mois.
Une évolution qui ne concerne pas seulement l'île française. Le Florida Museum of Natural History compte 52 attaques non provoquées dans le monde en 2008, 64 en 2009, 81 en 2010 et 75 en 2011. Motif d'inquiétude supplémentaire, la pêche intensive de poissons oblige de plus en plus les requins en quête de nourriture à se rapprocher des côtes.
La préfecture de La Réunion a annoncé ce lundi le lancement d'une opération de pêche d'une vingtaine de requins et un renforcement de la sécurisation de plusieurs spots de surf. Il s'agit «d'une pêche scientifique» afin d'identifier la présence de ciguatéra dans la chair des animaux. La ciguatéra est une toxine extrêmement dangereuse pour l'homme, qui n'incite guère les professionnels à pêcher le requin et participe à la prolifération de cette espèce, selon les associations de surfeurs et les professionnels de la mer.
Autoriser la chasse
Le député-maire de Saint-Leu, Thierry Robert, avait provoqué une polémique en publiant la semaine dernière un arrêté autorisant la chasse au requin-bouledogue sur le territoire maritime de sa commune et en proposant de racheter leurs prises aux pêcheurs, alors que leur commercialisation est interdite. Après une entrevue avec le ministre de l'Outre-Mer, Victorin Lurel, il a accepté de retirer son arrêté en échange de la mise en œuvre de cette opération de pêche dans la Réserve marine encadrée par les services de l'État.
En Australie, on songe aussi à retirer au grand requin blanc son statut d'espèce protégée, après une attaque mortelle en juillet, non loin de l'île de Wedge, la cinquième en moins d'un an dans la région.
Les surfeurs mis en cause
Mais la chasse est-elle une solution efficace? D'après Christopher Neff, chercheur à l'université de Sydney, les statistiques après une décennie d'abattage à Hawaï prouvent que cette stratégie ne fonctionne pas.
Les écologistes relativisent le phénomène, rappelant que l'Homme ne fait pas partie du régime alimentaire des squales et que la grande majorité des accidents sont donc dus à une méprise: les requins peuvent en effet confondre la planche des surfeurs avec une otarie ou une tortue. De fait, moins d'une centaine d'attaques sont recensées chaque année, un chiffre négligeable si on le compare avec le nombre d'accidents de la route, ou même d'attaques de chiens. En revanche, au moins cent millions de requins sont tués chaque année, surtout par les pêcheurs. 75 % des espèces sont ainsi déjà menacées. Or les poissons prédateurs jouent un rôle crucial de «nettoyeur» de l'océan. Chercher à en tuer davantage serait donc non seulement inefficace mais nocif pour l'équilibre de l'écosystème marin.
Pour les associations de défense de l'environnement, l'accroissement des accidents s'explique surtout par la multiplication du nombre de surfeurs, qui seraient 27 millions selon la Surf Industry Manufacturers Association. Or «la mer appartient d'abord aux espèces marines, c'est leur milieu, leur habitat», affirme la Fondation Brigitte Bardot. Sous entendu: c'est aux surfeurs de s'adapter aux risques que représente inévitablement l'exploration d'espaces sauvages. De leur côté, les gouvernements peuvent interdire le surf dans certaines zones à risque, comme le Brésil l'a fait dans des plages de Recife.
Un bouclier électrique sous les planches de surf?
D'autres associations plus conciliantes vis-à-vis des aventuriers de la mer sont favorables à des solutions de compromis permettant d'éloigner les squales, sans les tuer. Limiter l'évacuation de déchets, qui attirent parfois les requins, dans les zones côtières serait un début.
Des mesures alternatives ont d'ores et déjà été explorées avec plus ou moins de succès. Testés en Australie depuis les années 30, ou plus récemment à La Réunion, les filets anti-requins ne sont par exemple pas infaillibles, «Ces filets ne sont pas continus et les requins les plus intelligents peuvent les contourner», expliquait récemment au Figaro Bernard Séret, océanographe spécialiste des requins au Muséum d'Histoire Naturelle. «De plus, ils ne peuvent pas être installés partout: il faut que la topographie le permette avec la présence de fonds assez plats». Surtout, ils sont très destructeurs pour l'environnement: les requins s'y prennent, tout comme les dauphins, raies et tortues. Un système électrique répulsif a été développé mais jusqu'à maintenant les résultats n'ont pas été probants».
En Afrique du Sud, «un bouclier électrique» anti-requins est peut-être plus prometteur. Cet appareil, qui exploite l'hypersensibilité du squale aux champs magnétiques, crée des spasmes au niveau du nez du requin. Les surfeurs peuvent le fixer à leur planche.
Le plus pragmatique reste encore, de l'avis de Bernard Séret, l'embauche de guetteurs, dont le rôle est de surveiller les plages avec des jumelles et d'avertir les touristes en cas de danger. Car comme l'a reconnu dimanche le maire de Saint Leu, «on ne pourra pas éradiquer totalement le risque requin».
Laura Raim .Lefigaro.fr
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