La compagnie entrave depuis 2009 l'enquête sur le crash des Comores. Elle pourrait être portée sur la liste noire européenne. Plusieu...
La compagnie entrave depuis 2009 l'enquête sur le crash des Comores. Elle pourrait être portée sur la liste noire européenne.
 |
| Plusieurs centaines de milliers de Comoriens avaient manifesté à Marseille en mémoire des victimes et pour protester contre les conditions de vol de la compagnie. © Claude Paris / AP / Sipa |
Deux ans et demi après le crash de l'Airbus A310 de Yemenia Airways en mer près de Moroni aux Comores, les causes de l'accident qui a fait 152 victimes restent officiellement inconnues, alors que les enregistreurs de vol ont été récupérés et analysés. L'opération, qui, repêchage compris, a coûté dix millions d'euros aux contribuables français, a été menée par le Bureau enquêtes accidents au Bourget. Ses experts déplorent la paralysie actuelle, mais sont tenus de respecter la confidentialité de l'enquête technique dans le cadre des traités régissant l'aviation civile internationale et le traitement des accidents.
Seule la République des Comores peut communiquer sur l'accident, mais ce pays, parmi les plus corrompus au monde avec le Pakistan et l'Indonésie selon transparency.org, a d'évidence choisi l'opacité. Ainsi, un premier enquêteur comorien, Ali Abdou Mohamed, qui s'apprêtait en 2010 à sortir un rapport technique révélant ce qu'il avait vu à la lecture des boîtes noires au BEA, a été limogé pour être remplacé par un prestataire aéroportuaire de Moroni qui a justement Yemenia Airways comme client... Le rapport en trompe-l'oeil finalement produit par celui-ci se garde bien d'évoquer les causes de l'accident et s'attarde sur des dysfonctionnements de l'aéroport qui n'ont rien à voir avec le crash. De plus, à la demande de Yemenia, les Comores veulent une relecture des enregistreurs de vol. Mais tous les bureaux d'enquête technique aéronautique dans le monde savent que ce crash est dû à une perte de contrôle de l'avion par l'équipage, et aucun n'a accepté cette mission, une véritable perte de temps.
Jouer la montre
Pour disculper sa compagnie, le Yémen a bien aussi tenté de faire accréditer une thèse de tir de missile effectué par erreur par un navire militaire français. Seulement, le 30 juin 2009, jour de l'accident, le plus proche bâtiment français était à deux jours de mer et, de plus, n'était pas armé de missiles.
Cette stratégie vise à favoriser le transporteur du Yémen, pays ami des Comores au point que Yemenia Airways y a été compagnie nationale. En jouant la montre, il est possible de s'opposer devant les tribunaux à l'indemnisation des familles en majorité françaises. Le vol IY 626 Sanaa-Moroni était, en effet, en correspondance avec un autre venu de Marseille et de Paris. La justice comorienne réalise aussi des records de lenteur : le tribunal de première instance de l'union des Comores, saisi en référé en avril dernier, n'a toujours pas rendu sa décision en vue d'une première indemnisation des victimes aux Comores.
Les autorités françaises semblent avoir épuisé les recours diplomatiques habituels auprès des dirigeants comoriens et yéménites. Toutefois, après un rendez-vous avec des familles et leurs avocats, Thierry Mariani, ministre des Transports, semble vouloir passer à la vitesse supérieure. Un communiqué indique qu'il est prévu d'"examiner avec la Commission européenne les risques que l'attitude de l'autorité yéménite (fait) peser sur la sécurité des vols de la compagnie Yemenia Airways et les conséquences que l'Europe (doit) en tirer". En clair, Paris va demander à Bruxelles de mettre Yemenia Airways en liste noire européenne, ce qui lui fermera la desserte de Paris, mais aussi de Londres, Francfort, Rome, etc. Motif : le transporteur ne respecte pas les règles de l'Organisation de l'aviation civile internationale qui prévoient la publication d'un rapport technique dans l'année qui suit l'accident. Et, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur l'attitude française, le représentant de la compagnie yéménite à Paris doit être reçu très prochainement par le cabinet du ministre.source:lepoint.fr
COMMENTAIRES