TÉMOIGNAGE - La tension monte de plus en plus sur l'île française de l'océan Indien, et les habitants s'inquiètent de la tournu...
TÉMOIGNAGE - La tension monte de plus en plus sur l'île française de l'océan Indien, et les habitants s'inquiètent de la tournure que pourraient prendre les événements...
Un climat de tension règne sur Mayotte. Après trois semaines de troubles et de manifestations contre la vie chère, et au lendemain de la mort d’un manifestant, le quotidien des habitants du DOM situé dans l'océan Indien, dans l'archipel des Comores, est de plus en plus compliquée. «Il règne un petit climat de guerre civile et il y a beaucoup d’inquiétude», raconte ainsi à 20 Minutes Alexandre, professeur à Mamoudzou, la préfecture. Il entame sa troisième année sur place, et, alors que les deux premières ont été «paradisiaques», il s’inquiète pour la suite.«Avant le décès du manifestant hier, pendant une manifestation qui a tourné à l’échauffourée, il n’y avait que des manifestations et quelques pillages. Mais cette nuit, ça a empiré: heurts avec la police par endroits, lancers de bombes lacrymogènes, de nombreux magasins ont été vandalisés, et il y en a même eu un qui a complètement brûlé sur Petite Terre.»
«On se serait cru en Somalie»
Les habitants de Mayotte tentent de vivre comme d’habitude, mais c’est difficile: la circulation routière est paralysée, car des groupes de manifestants ont monté des barrages et empêchent quiconque de passer - «y compris les ambulances qui veulent accéder à l'hôpital». Le trafic entre Petite et Grande Terre est aussi ralenti, il n’y a plus moyen de trouver une bonbonne de gaz, et de nombreux magasins sont fermés ou ouverts ponctuellement.«On fait la queue une heure pour acheter du pain», témoigne Alexandre. Et les habitants font des stocks, car personne ne sait combien de temps la situation va durer. «Mercredi, devant un magasin d’alimentation, on se serait cru en Somalie. Une centaine de personne -Mahorais et métros - faisait la queue pour acheter des sacs de riz, de farine et des produits de première nécessité devant le magasin. Les employés vendaient directement depuis le container.»
Heureusement, certains magasins parviennent à ouvrir leurs portes, mais les prix ont flambé et le marché noir se développe. Un paquet de cigarettes se vend ainsi dix euros.
«Tout est possible»
Pour tenter d’assurer un minimum la sécurité, les autorités ont fait appel à des gardes mobiles de la métropole et de La Réunion et les policiers au repos ont été rappelés d'urgence. «On est reclus chez soi, en espérant que les Mahorais ne vont pas s'en prendre aux blancs», explique Alexandre.Car l’autopsie d’Ali El Anziz, l’homme de 39 ans qui s’est effondré mercredi lors de la manifestation, doit avoir lieu ce jeudi, pour éclairer les circonstances de sa mort. «J’ai peur des conséquences si ce n’est pas une simple crise cardiaque. On attend aussi de voir comment va se dérouler la marche blanche à sa mémoire. La mère du défunt a déjà appelé au calme, tout comme Daniel Zaïdani, le président du conseil général. Mais il y a déjà eu des tabassages de blancs il y a quelques années. Je pense que tout est possible, on peut en arriver là.»
Bérénice Dubuc:20minutes
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