Une étude révèle la situation financière catastrophique de la Jirama, la compagnie nationale d'eau et d'électricité de Madagascar...
Une étude révèle la situation financière catastrophique de la Jirama, la compagnie nationale d'eau et d'électricité de Madagascar.
Réalisée par deux cabinets internationaux de conseil, Castalia et Mazars, sur demande de la Banque mondiale, une étude, la plus poussée jamais publiée sur le secteur de l’électricité à Madagascar, a été révélée le 24 septembre à la presse, après avoir été présenté au gouvernement.
La Jirama, la société nationale d’eau et d’électricité, est un gouffre financier pour le pays : elle a atteint cette année les 1,6 milliard d’ariary (400 millions d’euros) d’impayés avec une perte annuelle estimée à 290 milliards d’ariary en 2018. Une « bombe à retardement », d’après les experts qui viennent de proposer un plan de redressement.
Sur chaque kilowattheure vendu, la Jirama perd systématiquement de l’argent. En moyenne, elle le vend moitié moins cher 0,12 euro que ce que cela lui a coûté (0,24€). Certains gros consommateurs, des industries pour la plupart, réussissent à payer un cinquième de son prix réel, soit 0,05 euro.
Pour Gianmarco Servetti, du cabinet Castalia qui a réalisé l’étude, il est impératif de rattraper le retard d’ajustement tarifaire quasi-inexistant ces dix dernières années. En clair, augmenter les tarifs tout en protégeant les plus petits consommateurs, qui représentent 80% de la clientèle, de ces hausses.
« Si aujourd’hui les ventes d’électricité sont aussi limitées et rapportent si peu, c’est parce qu’il y a beaucoup d’énergie qui est produite et injectée dans le système mais qui n’est pas vraiment vendue, explique-t-il. Parce que soit elle est volée [près de 10% du déficit], soit elle n’est pas facturée correctement. Donc aujourd’hui, la première mesure pour encourager l’efficacité énergétique, c’est de pratiquer des prix qui reflètent le coût de service. Sans cela, le gâchis est encouragé. Et personne n’investit dans de nouveaux moteurs, de nouveaux systèmes d’éclairage, pour optimiser la consommation, car rien n’y incite. Donc, il est urgent de donner les signaux corrects économiques pour bien utiliser l’énergie et encourager des investissements retardés depuis longtemps ».
Retour à l'équilibre en 2023
Autre action à réaliser à court terme : la renégociation des principaux contrats thermiques passés avec la quarantaine de fournisseurs d’électricité chargés d’approvisionner la Jirama. Dans la pratique, ces fournisseurs d’électricité, les Independent Power Providers, exploitent les centrales thermiques et revendent ensuite les kilowattheures à la Jirama, qui se charge de l’acheminement de l’électricité vers les consommateurs.
Ces contrats, aux marges faramineuses pour certains, ont été passés ces dix dernières années. La société d’Etat n’arrive plus à les honorer causant ainsi des milliards d’ariary d’impayés. « Aujourd’hui, techniquement, ces contrats sont illégaux, explique Jan Kappen, spécialiste en énergie à la Banque mondiale. Il faut les régulariser, revoir les prix pour établir un prix soutenable pour la Jirama et avec un résultat acceptable par tout le monde ».
Le but à terme est d'en finir avec les subventions. Le meilleur scénario envisagé par les experts ambitionne un retour à l’équilibre pour fin 2023. Pour l’Etat, le principal défi reste de traduire cette étude en feuille de route réaliste et rapidement exécutable. Et de permettre à la compagnie nationale, sous perfusion continue depuis cinq ans avec jusqu'à 77 millions d’euros de subventions pour la seule année 2018, de se redresser.
Par RFI
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