Depuis hier, les jurés de la Cour d’assises de Saint-Denis jugeait une affaire qui a défrayé la chronique à La Réunion. Le 24 juin 2014, un...
Depuis hier, les jurés de la Cour d’assises de Saint-Denis jugeait une affaire qui a défrayé la chronique à La Réunion. Le 24 juin 2014, un homme de 33 ans était battu à mort en début de soirée sur le front de mer de Saint-Pierre. Deux jeunes, nés à Mayotte, ont été reconnus coupables.
Palais de justice de Saint Denis à La Réunion
(Crédits photo : JIR)
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Ils ont 21 et 26 ans. Ils en avaient deux de moins lorsque Maoulida Bacar Amadi et Aycham Ahmed ont été arrêtés à Saint-Pierre, au sud de La Réunion. C’était le 24 juin 2014, en début de soirée, après une agression terrifiante commise devant un bar réputé de la ville.
Lorsque les policiers arrivent devant «le factory», ils découvrent le corps d’un homme, en position latérale de sécurité, torse nu et bloqué entre deux voitures. Malgré l’intervention rapide des secours, la victime décède peu de temps après son admission au CHU de Saint-Pierre. Il s’agit de Johan Stuppa, 33 ans, le père d’une petite fille de 3 mois.
Les témoins racontent que l’homme a été roué de coups de poings et de pieds par deux jeunes mahorais. Et grâce aux descriptions fournies, il faut moins d’une heure aux policiers pour interpeller les deux suspects. Maoulida Bacar Amadi et Aycham Ahmed sont placés en garde à vue. Sur le premier, les enquêteurs découvrent le téléphone portable de la victime. Les dépistages démontrent que les deux hommes étaient sous l’emprise de l’alcool et de stupéfiants.
Deux enfances «cauchemardesques» à Mayotte
Les témoins ne s’étaient pas trompés. Les deux jeunes gens sont bel et bien nés à Mayotte. Le premier a vécu à Koungou, le second à Mamoudzou. Au tribunal, ils sont présentés comme des jeunes déstructurés et paumés, avec plus de 20 demi-frères et sœurs chacun, abandonnés par le père, confiés à la mère, incapable de les élever. «Mon enfance a été cauchemardesque», raconte Aycham Ahmed à l’enquêtrice de personnalité.
Puis, globalement, ils suivent tous les deux le même parcours. On les «exfiltre», vers la Réunion, chez un vague cousin qu’ils ne connaissent pas ou mal. Rapidement, c’est le plongeon vers une semi-marginalisation, à peine retenue par des associations qui leur viennent en aide. Des jeunes décrits aussi comme globalement respectueux, gentils et ne cherchant de problèmes à personne. Mais ce 24 juin 2014, ils avaient bu. «Nous avons acheté plusieurs bières de 50 cl à 12 degrés», admet Maoulida Bacar.
Tué pour avoir photographié son voleur
L’enquête permet de retracer avec une certaine précision les circonstances du drame. Johan Stuppa avait pris ses deux agresseurs en stop vers 18 heures. Mais après les avoir déposés et être rentré chez lui, il se rend compte que sa sacoche a disparu. Il part alors à leur recherche et repère l’un d’eux vers 20h30, près d’un café du centre-ville de Saint-Pierre.
Très énervé, il descend de son véhicule et reproche aux deux garçons de l’avoir volé. Les deux accusés nient. Puis, avec son portable, la victime prend une photo de Maoulida Bacar Amadi pour la présenter aux policiers. C’est alors que le trentenaire est pris en chasse par les deux jeunes qui parviennent à le rejoindre. Il reçoit alors de nombreux coups. Il est déjà inconscient lorsque Maoulida Bacar Amadi s’empare de son portable.
Une honte trop tardive
Les agresseurs prennent la fuite, tandis que les témoins appellent les secours et les forces de l’ordre. Durant leur garde à vue, les accusés reconnaissent globalement les faits mais nient dans un premier temps le vol de la sacoche, avant d’avouer. Ils sont mis en examen pour vol avec violence en réunion ayant entraîné la mort sans intention de la donner et complicité, et ils sont incarcérés. Ils risquent la réclusion criminelle à perpétuité.
A la barre, hier et aujourd’hui, les accusés présentent des excuses. «J’ai honte de vous regarder. Ce que je vous ai fait, c’est mal. Je pense toujours à ça. J’espère, qu’un jour, votre petite fille pourra me pardonner de lui avoir pris son père», lance Maoulida Bacar Amadi, à la famille assise sur le banc des parties civiles. «Tous les jours, j’y pense. Je ne voulais pas que ça se passe comme cela. Je suis vraiment désolé», affirme Aycham Ahmed à la barre.
Mais ces excuses n’ont pas vraiment convaincu l’avocat général qui a requis, ce mercredi matin, 15 et 20 ans de réclusion criminelle, des peines assortis d’une peine de sureté des deux tiers.
Le verdict est tombé en milieu de journée. Les jurés et les magistrats ont finalement condamné les deux hommes à 10 et 15 ans de réclusion criminelle.
RR, Le JDM - Journal de Mayotte
avec le JIR