Laurent Canavate, directeur de publication de Mayotte hebdo, a écrit un éditorial au vitriol fustigeant ce qu'il appelle "l'im...
Laurent Canavate, directeur de publication de Mayotte hebdo, a écrit un éditorial au vitriol fustigeant ce qu'il appelle "l'immigration clandestine" qui serait une menace pour Mayotte. Monsieur Canavate n'est ni un xénophobe ni un raciste. C'est un habitant de Mayotte inquiet pour l'avenir de l'île qu'il aime. Nous pensons qu'il est sincère mais la sincérité en soi n'est pas une garantie de vérité.
L'île hippocampe traverse une crise économique et sociale sans précédente. Loin d'être la panacée, la départementalisation tant rêvée, tant sublimée, tant idéalisée, par nos frères mahorais, se révèle être un échec patent. Il faut un coupable, un responsable, un bouc émissaire. Et pour Canavate, ce n'est ni l'État français ni le département de Mayotte, ce sont les migrants qui mettent à mal le processus de départementalisation. Son éditorial n'est qu'un tissue d'inepties. Nous avons jugé important de démonter de manière cordiale et respectueuse les mensonges qu'il propage.
Non Monsieur Canavate, les Comoriens n'y sont pour rien si la départementalisation a été menée en dépit du bon sens. Si l'administration départementale est insuffisamment préparée et n’a pas su adapter ses structures pour assurer pleinement ses nouvelles compétences, tel que le démontre le rapport accablant de la Cour des Comptes. Les Comoriens n'y sont pour rien si, avec le passage à la fiscalité de droit commun, la structure des recettes de fonctionnement du Département a été bouleversée et que les recettes fiscales et douanières qui représentaient 76 % des recettes de fonctionnement sont désormais de 37 %.
Les Comoriens n'y sont pour rien si, l'effort budgétaire de l’État français par habitant à Mayotte est le plus faible de tous les DOM, 3964 euros à Mayotte, alors qu'il est de 6420 en Guyane et 5331 à La Réunion. Un alignement du niveau de dépenses par habitant sur celui de la Réunion nécessiterait un effort supplémentaire de 307 millions d’euros par an. les Comoriens n'y sont pour rien, si Mayotte est un désert médical, avec 83 médecins pour 100 000 habitants, contre 285 pour La Réunion. Et contrairement à ce que vous dites, la majorité de soins prodigués à Mayotte, 60% selon L'ARS, le sont à des assurés sociaux.
Ils n'y sont pour rien, si la délégation de service public (DSP) au port de Longoni constitue un risque pour le Département. Ils n'y sont pour rien si l'État français n'a toujours pas réglé la problématique du foncier. Ils n'y sont pour rien si depuis plus de dix ans, la direction de l'aide sociale à l'enfance a refusé, délibérément de créer des centres d'éducation pour les mineurs isolés. À l'époque les politiciens mahorais disaient que cela créerait un appel d'air. ils ont préféré cruellement, laisser ces mineurs vivre comme des chiens dans les rues. Aujourd'hui ces mineurs qui, selon la loi, auraient dû être pris en charge par la protection de l'enfance, sont devenu majeurs et leur font payer les conséquences de leurs politiques inhumaines.
Vous dites que : "plus de 40% de la population mahoraise est clandestine, soit bien plus de 120.000 personnes. Cela représenterait 26 millions de clandestins en France !" Ces chiffres ne se basent sur rien de concret, aucune statistique, aucune enquête, ou alors vous semblez confondre, volontairement ou pas, "étranger' et "clandestin". Car selon l'INSEE il y à Mayotte"40 % d’étrangers en situation régulière (84 600)". Contrairement à l'impression que vous souhaitez donner, le solde migratoire est déficitaire, toujours selon l'INSEE. Tous les 5 ans, cet institut comptabilise presque à 20 000, les départs de natifs de Mayotte vers la métropole ou La Réunion. Ajoutez à cela les 20 000 expulsions par an et le paradigme change complètement.
Parlons "sans gêne" comme vous dites. Vous qui souhaitez "nettoyer les bidonvilles" comme si ses habitants étaient des ordures. Vous vous demandez si ces populations s'intégreront un jour. Mais de qui vous vous moquez? Vous, qui venez de Toulouse, vous êtes-vous intégré à la société mahoraise? Parlez vous la langue locale? Qui de vous ou d'un comorien, se sentirait le plus intégré dans un chigoma ou un dahira?
Les véritables responsables de l'échec de la départementalisation sont connus de tous, mais vous n'aurez jamais le courage de les dénoncer, vous pré-ferez vous en prendre aux franges les plus vulnérables de la société. Quel courage!
