Chez nous, aux Comores, la littérature a aussi un sens. Ma lecture cursive de Tombé du ciel, pièce de théâtre d’Abdérémane S.M. Wadjih nour...
Chez nous, aux Comores, la littérature a aussi un sens. Ma lecture cursive de Tombé du ciel, pièce de théâtre d’Abdérémane S.M. Wadjih nourrit ma réflexion sur la naissance naissante de ce genre littéraire aux Comores où la consommation de lecture avance à pas de tortue. J’ai lu avec appétence cette pièce de théâtre dont le message, avant qu’on découvre qu’il suscite une prise de conscience, procure d’abord un plaisir mais un plaisir qui reste conscient !
Pour que l’objet littéraire surgisse dans toute sa puissance, ce jeune docteur en anthropologie n’a pas tardé à nous livrer des apartés dont les personnages s’opposent, se lèguent, livrent leur vérité mais Tamu, personnage principal de cette pièce a à cœur de vivre sa déchirure « secrète » qui entrechoque sa mémoire qui, en vain, s’attache à trouver un dérivatif à la misère quotidienne dont il est victime. La « folie incomprise » de ce personnage a fait que le monde de la communication des personnages soigneusement gérés et unis dans une étreinte dialogue devient le monde d’illusion et de magie où la parole de tous les personnages se trouve entièrement libérée.
Tenaillé par la misère politique qui s’abat sur son archipel natal, Tamu s’interroge sur sa vie sur terre, sa raison d’être vraiment Comorien en multipliant ses plaintes contre la délinquance politique qui encombre sa terre qui l’a vu grandir en tout cas pas en beauté. Son amour pour son pays, sa volonté de voir celui-ci changer les mauvaises mentalités irriguent cette pièce en profondeur et en fusionnent en émouvante parabole sur l’omniprésence de la corruption qui gangrène l’archipel des Comores.
Amoureux des mots et de la musique, Abdérémane Wadjih joue avec les mots et sur les mots pour cerner le rôle du théâtre et susciter l’émotion du lecteur. Voilà pourquoi au fil de lecture, on découvre sa vocation d’écrivain en nous faisant déguster une prose tempérée dotée d’une audience où il s’en profite pour dénoncer les injustices qui déchirent son pays en lambeau. Le pouvoir de la philosophie de ce livre tient à ce qu’il cherche à toucher le lecteur au-delà des circonstances particulières.
D’ailleurs le recours à la sorcellerie dépravée - du gala à la trance pour trouver une solution à la « folie » de Tamu dont la vision dépasse l’imagination de ses parents et des esprits - pousse à penser, puis à agir philosophiquement en conséquence.
Mon analyse de cette pièce de théâtre est une mise en garde contre toute critique négative qui considère la littérature comme plaisir. J’affirme encore une fois que la littérature est un effort, une lutte pour atteindre la connaissance et la liberté. Tombé du ciel en est une parfaite illustration. Son message porte loin en cette période de vote où les Comores sont secouées par une crise politique sans précédent. Je souhaite qu’il soit écouté et reçu littérairement et politiquement en rejouant la pièce.