Dans le cadre de l’observation des élections législatives, des élections des conseillers des iles et des conseillers communaux et suite à ...
Dans le cadre de l’observation des élections législatives, des élections des conseillers des iles et des conseillers communaux et suite à l’accréditation par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), l’Observatoire des élections des Comores a réalisé une mission nationale d’observation du second tour des élections des Représentants de la Nation et du tour unique des élections des Conseillers communaux du 22 février 2015, sur un financement de l’Organisation Internationale de la Francophonie (O.I.F). Conduite par le Président de l’Observatoire des élections et les coordinateurs de l’association au niveau des iles d’Anjouan et de Mohéli, la mission était composée de 71 observateurs nationaux déployés en 30 équipes dont 5 à Mohéli, 8 à Anjouan et 17 en Grande Comore. La mission a observé les opérations électorales sur l’ensemble des circonscriptions électorales de ces trois îles. Sur les 718 bureaux de vote établis, la mission a visité 652 bureaux de vote, soit un taux de couverture de 90,80 %. La mission a assisté au dépouillement de 66 bureaux de vote (…).
Sur cette base, la mission fait les constatations suivantes.
Au niveau de la phase préélectorale,la mission a relevé :
· L’amélioration des conditions du vote qui ont pris en compte les insuffisances et les faiblesses observées lors des scrutins du 25 janvier 2015 ;
· une parfaite collaboration entre les acteurs du processus électoral ;
· un travail encourageant du cadre permanent de concertation, d’échange et de suivi du processus électoral (…)
La mission a toutefois relevé :
· Le manque de sensibilisation sur la distribution des cartes d’électeurs pour ceux qui ne les ont pas reçus lors du 1er tour ;
· l’insuffisance
de transparence sur certaines dispositions électorales de la part de la
CENI, particulièrement celles relatives aux listes électorales et aux
listes des membres des bureaux de vote ;
· une communication tardive, insuffisante et non appropriée de la procédure de vote, notamment celle des Conseillers communaux, de la part des acteurs du processus électoral ;
· un environnement de tension et de peur observé à Moroni avec la stigmatisation des électeurs originaires de l’île d’Anjouan;
· le maintien de l’opposition de certaines communautés à la tenue des meetings dans leurs localités ;
· une forte campagne de sensibilisation en faveur du vote « nul » dans certaines localités ;
· l’établissement
des procurations et leur légalisation par les tribunaux de première
instance en dehors de la période légale fixée par le code électoral.
Au niveau de la phase des opérations électorales le jour des scrutins,la mission a pris note du bon déroulement du scrutin. Elle a relevé :
· L’ouverture à temps de la majorité des bureaux de vote contrairement au 1er tour ;
· la disponibilité à temps des matériels électoraux nécessaires;
· l’amélioration
des défaillances matérielles constatées lors du 1er tour notamment les
lampes d’éclairage dans la majorité des bureaux de vote (…) ;
La mission a néanmoins constaté :
· La non mise à disposition des moyens de communication aux membres des bureaux de vote ;
· l’absence de plusieurs délégués de candidats/partis notamment pour des Conseillers communaux dans plusieurs bureaux de vote ;
· l’emplacement de plusieurs bureaux de vote dans des endroits inappropriés ;
· l’émargement des listes par des membres du bureau en lieu et place des électeurs et électrices ;
· des
erreurs de procédure dans plusieurs bureaux de vote à Anjouan à
l’exemple de Adda I et Maweni I dans la région de Domoni II où des
bulletins des Députés se trouvaient dans l’urne des Conseillers
communaux et inversement, et aussi à Adda I et Adda VI l’application de
l’encre indélébile n’était pas systématique et obligatoire ;
· la
persistance de la corruption des électeurs dans certaines régions à
Anjouan (Ankibani, Chirokamba et Bandrajou), à Moroni (Mbouéni, Bacha
II) et à Mohéli ;
· des arrestations arbitraires des membres de candidats de l’opposition à Mohéli ;
· des
tentatives de fraudes dans certains bureaux de vote à Anjouan et à
Mohéli. C’est le cas de Chiroroni II, Ankibani II, Dziyani I et Mrijou
II dans la région de Nioumakele I, où des membres de bureaux de vote ont
essayé de faire sortir des bulletins de vote hors des bureaux cités ; à
Mohéli, des procurations sont signées « par ordre » au lieu de la signature du président du Tribunal de 1ère instance comme stipulé dans l’article 122 du code électoral ;
· des cas d’intimidation de certains membres de bureaux de vote notamment à Moroni (Bacha II) et à Mohéli (Djoiezi et Fomboni) ;
· des
fraudes manifestes dans certains bureaux de vote en Grande-Comore et à
Anjouan. On peut citer le cas de Djomani III, à Moroni, où l’urne a été
mise en quarantaine juste après le dépouillement des bulletins ; de
Ntsoudjini (en Grande-Comore) où des individus munis de cartes
d’électeur autres que les leurs ont été autorisés à voter ; Kangani II
(région de Nioumakele II, Anjouan) où 9 cas d’individus munis de cartes
d’électeur mais ne figurant pas sur la liste électorale ont été
autorisés à voter ;
· des
cas d’interruption des opérations de vote dans certains bureaux de vote
à Anjouan (Ankibani II pendant une demi-heure) et Moroni (Coulée I et
II pendant une heure de temps après le saccage d’une partie du matériel
électoral) ;
· des
présomptions de bourrages d’urnes dans certains bureaux de vote,
notamment à Moroni où des chiffres alarmants sur le taux de
participation ont été constatés. A Bacha II, à titre d’exemple, il a été
relevé un taux de participation record de 17,18% en 1h de temps pendant
qu’aucune file d’attente n’a été observée à l’extérieur du bureau de
vote pendant la même période ; à Nindri I (Anjouan), où le président du
bureau de vote a confirmé le bourrage d’urnes par les membres du
bureau ;
· la circulation, à Mohéli, de véhicules portant des Laissez-passer d’Ambassades/Consuls à Djoiezi.
· la
non transparence et la partialité de certains membres de bureaux de
vote, à l’exemple des cas des bureaux de vote de Bacha II (Moroni) ; et à
Pomoni I où l’accès aux informations sur le nombre de votants a été
refusé aux observateurs ;
· la
présence parfois pressante de certains candidats et collaborateurs des
candidats aux alentours et parfois dans les bureaux de vote ;
· la signature par les membres de bureau de vote des procès-verbaux de dépouillement vierges en début de journée avant la fin des scrutins.
Au niveau de la phase post-électorale,la mission a relevé :
· Une
nette amélioration du temps pour l’acheminement des résultats au palais
du peuple, les premiers résultats à y parvenir étant ceux de Moroni
(arrivés dans les environs de 21h40) et les derniers étant ceux de
Bambao ya djou (vers 7h10 du matin du lendemain du scrutin) (…);
La mission a néanmoins constaté :
· La
persistance de la lenteur de l’acheminement des enveloppes et la
centralisation des résultats des élections particulièrement ceux
d’Anjouan et de Mohéli ;
· des
informations relatées par des leaders des partis politiques et des
candidats, de tentative d’inversion ou de falsification des résultats
par des membres des bureaux de vote ;
· le non application effective et immédiate des dispositions pénales portant sur les délits relatifs au jour du scrutin ;
· la
faiblesse des actions d’information et de sensibilisation des candidats
et des électeurs sur les processus de centralisation des résultats.
La
mission nationale d’observation de l’Observatoire des Elections se
réserve le droit de donner tous les détails sur les irrégularités qui
ont été observées dans son rapport consolidé d’observation du scrutin du
22 février 2015. Sur la base de la compilation générale des
observations de ses équipes, la mission d’observation de l’Observatoire
des élections conclue que les élections du 22 février 2015 ont été
libres et acceptables.Pour le bon déroulement des prochaines échéances électorales, la mission d’observation recommande :
· Au Gouvernement et aux exécutifs des îles :
- de renforcer la lutte contre l’utilisation des biens publics à des fins électorales ;
- de renforcer les capacités des institutions impliquées dans l’organisation des élections ;
- de renforcer le dialogue politique pour une implication effective de tous les acteurs dans le processus électoral ;
- de répertorier à l’avance les zones sensibles et y renforcer des agents de sécurité ;
- de
lancer le projet de réhabilitation, de réforme et de modernisation du
système de l’état civil en vue de sécuriser l’identité de la population, faciliter le recensement général de la population et l’établissement des listes électorales fiables.
· A la Cour Constitutionnelle :
- De vérifier, analyser les irrégularités dans le déroulement des opérations électorales soulevées par les requérants ;
- ordonner des enquêtes sur les cas des fraudes, de falsification et
des bourrages des urnes soulevés par les requérants et se faire
communiquer tous documents et rapports ayant trait aux scrutins
conformément aux dispositions de la loi organique relatives aux autres
attributions de la Cour Constitutionnelle ;
- de contrôler
rigoureusement les nombres de votants et les suffrages exprimés dans
les procès-verbaux, les émargements des électeurs et la régularité des
procès-verbaux.
- d’ordonner
l’organisation des nouvelles élections partielles en cas d’annulation
partielle ou totale des résultats qui affecte le choix de l’électorat
dans une circonscription conformément aux dispositions du code
électoral.
· A la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI),
- d’écourter, autant que possible, les délais de proclamation des résultats provisoires ;
- de
renforcer la transparence du processus en améliorant la communication ;
de revoir la composition des CECI et des membres des bureaux de vote
pour rétablir leur crédibilité ;
- de renforcer les capacités des membres des bureaux de vote ;
- de désigner les membres des bureaux de vote en fonction de leur niveau d’études ;
- de faciliter la reconnaissance des candidats en introduisant leurs photos dans les bulletins (cas des Conseillers communaux) ;
- de faciliter davantage le travail des observateurs en prenant toutes les dispositions nécessaires et appropriées ;
- de sauvegarder et sécuriser le matériel électoral en vue de la prochaine élection présidentielle.
· A la Commission Nationale de Prévention et de Lutte contre la Corruptionde s’impliquer dans la lutte et la dénonciation des actes de corruption des électeurs ;
· Aux partis politiques et aux candidats,
- de renforcer la formation de leurs représentants dans les bureaux de vote ;
- de renforcer la présence de leurs représentants dans les bureaux de vote ;
- de
participer activement dans la sensibilisation et l’éducation des
électeurs, notamment les jeunes, sur la culture démocratique et
citoyenne et l’importance des scrutins ;
· Aux présidents des Bureaux de vote,d’afficher systématiquement les résultats après dépouillement et mettre à disposition les procès-verbaux à qui de droit ;
· Aux organisations de la société civile,
- de lancer une forte campagne de sensibilisation des citoyens pour s’inscrire sur les listes électorales ;
- de
renforcer la sensibilisation des électeurs et des électrices sur
l’importance du scrutin, le rejet de toute forme de corruption et la
dénonciation de l’utilisation des deniers publics et des moyens de
l’état pour des fins électoralistes (…) ;
· Aux partenaires internationaux :
- De
poursuivre le renforcement des capacités des acteurs et des
institutions impliqués dans le processus électoral, en mettant l’accent
sur la sensibilisation, la formation ;
- d’ accompagner la
réforme et la modernisation du système de l’état civil comorien
conformément aux recommandations des déclarations des trois conférences
des Ministres africains en charge de l’état civil de 2010, 2012 et 2015
auxquelles les Comores ont participé.
L’Observatoire
des élections tient à féliciter tous les acteurs nationaux et
internationaux qui ont contribué au financement, à l’organisation et au
bon déroulement du double scrutin du 22 février 2015 (...).