La seule présence de Mme Saada Ali Ahmed Chahid compense toutes les parités du monde L’accueil, au Palais de l’Élysée, d’une délégati...
La seule présence de Mme Saada Ali Ahmed Chahid compense toutes les parités du monde
L’accueil, au Palais de l’Élysée, d’une délégation comorienne, le mardi 3 février 2015, n’a pas fini de faire parler de lui. De manière générale, les réactions sont positives, même si, ici et là, on a lu des commentaires tendant à attribuer à Hachim Saïd Hassane, chef de la délégation des 35 Comoriens, le projet imaginaire et complètement surréaliste et loufoque de restauration de la monarchie aux Comores, à son profit, dit-on. Allons bon! De même, il a fallu écouter les plaintes de ceux qui estiment que la délégation était essentiellement composée de Grands-Comoriens, à un moment où les Mohéliens et les Anjouanais ont déserté les espaces publics comoriens de France, et ne militent plus. Pourtant, il n’y avait pas une île qui n’était pas représentée dans la délégation. Rien qu’au niveau de la Grande-Comore, ce fut un calvaire pour composer la liste des personnalités, parce qu’il fallait tenir compte de nombreux et inextricables critères sociologiques de l’île, à travers ses régions, ses grandes villes, ses données sociographiques par lignée, et si la Grande Communauté comorienne de France avait su que la composition d’une délégation était à l’étude, il n’aurait pas été possible de la constituer sans des bagarres de rue et des barricades, parce qu’aucun membre n’aurait été jugé, par certains, «digne» d’y figurer.
Nous connaissons la mentalité comorienne, et il est inutile de chipoter sur des réalités vécues et que chacun connaît. Et, naturellement, certains ont signalé que la parité hommes-femmes n’était pas respectée lors de la composition de la délégation. En termes de chiffres, il est vrai qu’il n’y avait que deux femmes dans la délégation: Mme Saada Ali Ahmed Chahid et Mme Sitti Abdoulfatahou. Deux femmes sur trente-cinq personnes, ça fait très faible comme moyenne. Pourtant, à y regarder de près, il y a un détail qui saute aux yeux: la qualité peut venir au secours de la quantité, parce que les deux dames faisant partie de la délégation, du fait de leurs qualités personnelles et de leurs mérites individuels, unanimement reconnus, représentent un tel magistère moral qu’elles équivalent à une délégation de 100 hommes, même les plus marqués par «la sève toujours vivace de [leurs] vertus héréditaires», pour reprendre le mot joyeux du grand diplomate français Auguste Philippe Charles de Beaupoli, Comte de Saint-Aulaire. Pour nous en rendre pleinement compte, il suffirait à peine de ne citer que l’exemple de MmeSaada Ali Ahmed Chahid.
Mme Saada Ali Ahmed Chahid se situe à gauche de la photo, aux côtés de Mme Sitti Abdoulfatahou, grande militante associative à Aubervilliers, et de Mme Hélène Le Gal, Conseillère du Président François Hollande pour les Affaires africaines, qui recevait, avec son collègue Thomas Melonio, la délégation comorienne. La présence de Mme Saada Ali Ahmed Chahid au sein de la délégation a illuminé celle-ci ainsi que la rencontre elle-même parce que cette Grande Dame est connue pour être née au sein de l’aristocratie et de la bourgeoisie des Comores, à Bab El Djanane, qu’un glissement sémantique transformera en «Badjanani», néanmoins un quartier qui symbolise l’éclat de la ville de Moroni, et plus précisément au Mpvoipvwani, qui signifie «force et honneur». Par respect et déférence, on l’appelle Mama Moinamina Bafakih, du prénom de sa fille aînée, comme cela est de coutume aux Comores. Les enquêtes menées ici et là permettent d’affirmer que ses origines princières n’ont jamais fait de doute. Quand on examine bien la photo qui accompagne cet article, on constate que c’est vêtue de ses habits traditionnels («Mkumi» et «Mawuwa»), et portant des bijoux royaux («Mkufu wa sulutri», «Madjassi», «Nkamé ya Hadhoirani», «Kekeya yaki Mtsangani», «Mbere ya Ikowa sha bwe la Djawuhari» ou bague en émeraude), qu’elle s’est présentée devant les portes du Palais de l’Élysée, précédée de forces de l’ordre chargées de veiller sur la sécurité et le confort de la délégation comorienne.
En même temps, il est à noter que Mama Moinamina Bafakih est connue à Moroni et ailleurs aux Comores comme la Grande Dame du Parti vert du regretté Saïd Mohamed Cheikh, mais également comme auteure, compositeur et chanteuse spécialisée dans le répertoire classique. Elle est surnommée «La Professeure» par ses proches.
Signalons, enfin, que Mme Saada Ali Ahmed Chahid est la veuve du regretté Bafakih Bin Dahlane, ancien dignitaire et grand notable de Moroni, ancien Maire de la capitale, ancien administrateur civil lors de la période de l’autonomie interne, Commandeur de l’Étoile d’Anjouan et officier de la Légion d’honneur. Elle est aussi la petite-fille du prince héritier de Moroni, Al Hadj Charif Abdallah, du clan Wegnafedjimba, un dignitaire originaire de Bilad El-Cham (Damas, Syrie), le père des regrettés Dini et Saïd Tourqui Charif, hommes d’affaires, argentiers, banquiers et bienfaiteurs de la ville de Moroni.
Par ARM