DÉCLARATION DU COMITÉ DE SOUTIEN DES DÉTENUS DU 19/04/2013 Aux Comores, douze personnes ont été condamnées à la suite d'un procè...
DÉCLARATION DU COMITÉ DE SOUTIEN DES DÉTENUS DU 19/04/2013
Aux
Comores, douze personnes ont été condamnées à la suite d'un procès
inique orchestré par la Cour de Sureté de l’Etat, malgré les tortures
impunies qu’elles avaient subies pendant presque deux ans de détention.
En
effet, le samedi 31 janvier 2015, cette Cour de Sureté, la toute
nouvellement déterrée des cartons datées de la République Fédérale
Islamique des Comores, vient de condamner pour l’occasion 12 hommes à
des peines allant jusqu'à 10 années de réclusion pour des motifs liés à
leur implication dans la dite « tentative de coup d'Etat du 19 avril
2013 ».
Ces innocents, des faussaires
D’un
côté et tout au long de ce procès, les juges n’ont fait obsession que
de dérouler pas à pas leur stratégie de falsification. Celle-ci consiste
à prouver malaisément que ces innocents ne sont en réalité que des
faussaires. D’un côté de la barre, un président de cette
Cour, commandité à rester inaudible quant aux tortures relevées par les
parties adverses et par lesquelles des aveux sont obtenus ou retenus
sans faire objet d’enquête exhaustive. Evidemment, leurs auteurs
demeurent épargnés de toute juridiction.
C’est
un procès à la hache. Les jurés et le président de la Cour ont mené
sans aucun respect de la justice. La force préméditée des autorités est
de garder en prison des gens qui ont été cités sous l’effet des tortures
par d’autres. Accusés à tort alors que tout le monde sait que des
militaires et des surveillants se permettaient sans aucune autorisation
judiciaire d’effectuer des interrogatoires dans l’objectif de prendre
plaisir à torturer.
Quant aux « ricaneries » du Commissaire du gouvernement Monsieur Soilihi Mahamoud, c’est une magouille politique pour disperser les cartes. Il a affirmé qu’
«aucun prisonnier n’a eu de cicatrice». On souhaite à ce Monsieur qu’un
jour il ne rira pas le dernier à cause de ceux qui sont censés nous
protéger.
Allégations de tortures
Monsieur
Joris Nkoubé Ambe, originaire de la République Démocratique du Congo a
été maintenu en isolement total pendant 7 mois. Selon ses déclarations,
maintes fois les militaires du camp de Kandrani lui auraient roué de
coups de poing et de pied, et menacé de mort avec une arme à feu. Il est
condamné à 10 ans d'emprisonnement ferme.
Monsieur
Allamine Moustoifa, un autre accusé originaire du Tchad, a expliqué à
la cour que des agents de sécurité l'avaient également menacé de mort
pour l'obliger à « avouer » avoir commis des infractions liées à cette
«tentative de coup d'Etat ». Il est également condamné à 10 ans
d'emprisonnement ferme.
Monsieur
Mahamoud Ahmed Abdallah est un prisonnier d'opinion condamné à 6 ans
d'emprisonnement dont un an avec sursis juste parce qu’il a été cité à
tort par un accusé sous l’effet des tortures.
Monsieur Satoulou Ahamada est également prisonnier d’opinion est condamné à 6 ans dont un an avec sursis pour les mêmes raisons.
Lieutenant
Amdjad Djaé est condamné à 5 ans dont un an avec sursis. Il est
reproché d’avoir voulu vendre une arme. Son sort était prémédité et
scellé, ses enfants et sa femme de cet officier de l’AND étaient mis
dehors de leur logement de fonction peu de temps avant la tenue du
procès.
Monsieur
Maarouf Toybou est condamné à 4 ans dont un an avec sursis pour un soit
disant « non dénonciation d'un crime » et 1 an d'emprisonnement pour «
détention d'arme à feu » qui n’est en réalité qu’un fusil de chasse.
Messieurs
Mzembo Mobeko Samuel, Elika B. V, Ngena M. Pablo, Yombo Mokoko Joque,
Makembe Olivier tous originaires de la République Démocratique du Congo
sont condamnés de 4 ans d'emprisonnement pour avoir juste été en contact
avec leur compatriote Mr Joris Nkoubé Ambe.
Enfin,
Monsieur Nassib Said Ibrahim est condamnés à 24 mois d'emprisonnement
dont 2 mois avec sursis pour avoir « facilité l’entrée au territoire de
ces étrangers ». Ces condamnations se sont largement appuyées sur un
réquisitoire aux allures de pamphlet, truffé d’hypothèses et de
suppositions qui ne sont pas permises en droit pénal. C’est une
magouille politique pour disperser les cartes.
Heureusement
que deux détenus ont bénéficié d’un acquittement. Il s’agit de Fakra
Mohamed et d’Ali Ibouroi Ibrahim surnommé Babataille. Ce dernier a eu de
sérieux problèmes de santé. Le médecin de la prison centrale de Moroni
ne l’a pas autorisé à être amené à l’hôpital pour subir des analyses et
se faire soigner. Enfin, la cour a prononcé le relax de Maoulida Ben
Oussein.
Mépris des droits juridiques
La
commission des Droits de l’Homme des Nations Unies dans son rapport
concernant cette affaire avait conclu que ces détenus doivent relever du
tribunal correctionnel et non pas d’une Cour de Sureté qui statue sans
appel dont le Président est le Vice-président de la Cour
Constitutionnel. Les 4 assesseurs (dont un ne comprend pas le français)
sont tous désignés par le président de l’Union des Comores Ikililou
Dhoinine. Or, ce dernier a répété dans plusieurs de ses discours qu’il «
est victime de tentative de déstabilisation ». De ces faits, La
constitution de cette Cour et de ce procès par le Président de l’Union
des Comores n’est qu’une mascarade méprisante du Pouvoir Judiciaire.
Notre Cher Président est devenu omniprésent et prend pieds aussi bien
dans l’Exécutif et le Judiciaire.
Les
accusés ont été arrêtés sans mandat, et certains ont été emmenés de
chez eux ou en pleine rue avec violence. Or, ils n’étaient pas surpris
ni en début d’aucune action, ni en flagrant délit. Donc, aucune
infraction n’a pu pas être caractérisée. Les avocats se sont plaints
auprès de cette Cour Spéciale que leurs demandes concernant des éléments
de ce dossier n’étaient toujours pas honorées. Il s’agit en particulier
du fameux compte rendu de la « Commission Rogatoire » que le
Commissaire du gouvernement Monsieur Soilih Mahmoud s’est beaucoup
passionné, excité et exalté d’inspiration. Cette Cour de Sureté a rejeté
68 demandes de nullité formulées par les avocats des accusés.
Par
ailleurs, un militaire français originaire des Comores, Monsieur Ahmed
Ibrahima (proche de l’ancien président Azali) qui a été souvent cité
dans le dossier a été extirpé du pays lors des arrestations d’avril 2013
par son « ami » Ahamada Madi BOLERO, qui n’est autre que l’actuel
Directeur de cabinet à la Présidence et Chargé de la Défense.
Autre
« élément clef », le français Patrick KLEIN que les autorités
comoriennes considèrent comme étant le « commanditaire » n’a même pas
été condamné par contumace alors que des Accords Judiciaires
permettraient aux autorités de nous révéler leurs démarches
d’extradition dans ce sens.
Remise de peine ou grâce présidentielle
Nous
regrettons que ce procès se soit déroulé en Cour de sureté. Sa tenue
est déjà une avancée suite à deux années de détention. Mais, cette Cour
n’a pas toujours permis d’apporter les éléments de preuve. Pourquoi ?
Quelle est la raison d’Etat qui peut justifier que toute la vérité n’a
pas encore pu être établie sur cette affaire. Nous, membres du Comité de
soutien de ces détenus, demandons aux autorités judiciaires d’accorder
une remise de peine aux condamnés qui ont effectué presque la moitié de
cette peine en prison.
Nous sollicitons également auprès de S.E. Monsieur le Président Ikililou
Dhoinine de bien vouloir faire bénéficier de la grâce présidentielle
aux autres détenus qui ont subi de lourdes peines.
Pour
ceux qui sont acquittés ou relaxés, nous demandons aux autorités
comoriennes de leurs accorder des dommages pour les préjudices subies.
Ce
qui pourrait permettre de remédier aux erreurs ou vices de procédures
commises par cette cour spéciale ou la justice comorienne. Cela
contribue également au respect des droits fondamentaux de tous les
comoriens et des étrangers qui séjournent dans notre pays.
Comité de Soutien des prisonniers du 19/04/2013
Soutenu par l’association SOS DÉMOCRATIE COMORES et l’Association Comorienne des Droits de l’Homme (A.C.D.H).
Paris le 9 février 2015.