Ou comment les meilleures intentions, souvent fondées sur de gros clichés, finissent par rester au seul stade de l'intention. En Occi...
Ou comment les meilleures intentions, souvent fondées sur de gros clichés, finissent par rester au seul stade de l'intention.
En Occident, on connaît tous plus ou moins quelqu’un qui, un beau jour, a décidé qu’il irait «faire de l’humanitaire» en Afrique. Parce que, vous comprenez, il y a trop de misère, trop de maladies, la guerre et beaucoup trop de souffrances et donc, il faut aider les «petits Africains».
Sur le continent, qui n’a jamais rencontré d’Occidental, souvent looké façon New Age, souvent encore trop jeune, jurant, la main sur cœur, être venu «sauver l’Afrique»?
Il suffit d’une guerre, d’une grave crise ou d’une épidémie —comme c’est le cas actuellement avec le virus Ebola dans certains pays d’Afrique de l’Ouest— pour que cet angélisme atteigne les paroxysmes les plus fous. Campagnes de fundraising par-ci et initiatives individuelles pour «aider» et surtout pour «informer le monde» (comprenez l’Occident) par-là. Une démarche qui conduit bien souvent ceux qui les entreprennent à prendre des risques inconsidérés.
Ainsi, il y a quelques semaines, Kieran Kesner, un jeune photographe new-yorkais, décide de se rendre au Liberia en plein désarroi face à l’épidémie de fièvre hémorragique.
L’idée du jeune photographe new-yorkais est généreuse et ressemble à toutes ces innombrables initiatives visant à aller aider les Africains à sortir de l’enfer. Ces initiatives sont généreuses mais dangereuses. Dangereuses parce qu’elles se fondent toutes sur les clichés les plus absurdes. Le premier des stéréotypes étant cette conception chez beaucoup d’Occidentaux que l’Afrique est un pays. Non, vraiment, que ce soit bin clair, une fois pour toutes, l’Afrique n’est pas un pays, comme nous avons déjà eu l’occasion de le souligner.
Sur ce point l’ONG norvégienne SAIH qui lutte contre les stéréotypes sur l’Afrique a visé juste avec sa toute nouvelle vidéo satirique. Dans ce document, on voit une jeune Occidentale qui rêve d’aller «aider les petits Africains», alors qu’elle n’a pas la moindre idée des spécificités, des différences et des complexités de cet immense continent.
L’ONG SAIH (née en 1961, au tout début de la mobilisation internationale contre l’apartheid) s’est fait une spécialité de tordre le cou à de telles vraies-fausses bonnes consciences. En 2013, elle publiait une vidéo qui ne manquait pas de saveur et que nous avions relayée sur Slate Afrique.
Les campagnes choc de SAIH en ont inspiré d’autres. Il y a peu de temps, l’ONG Solidarités International a publié des vidéos tout aussi satiriques.
Une Hippie passe un entretien d’embauche par Solidaritesinternational
Le but de cette campagne, avait expliqué l’ONG, était de montrer que «le métier d’humanitaire ne s’improvise pas, tout le monde ne peut pas aider sur le terrain».
Mais, peut-être cela signifie-t-il aussi que la vraie compassion, la vraie solidarité commence par l’humilité de reconnaître qu’on ne peut pas du jour au lendemain aller jouer les Zorro quelque part, surtout quand on ne sait rien de ce quelque part.
Raoul Mbog
Raoul Mbog est journaliste à
Slate Afrique. Il s'intéresse principalement aux thématiques liées aux
mutations sociales et culturelles et aux questions d'identité et de
genre en Afrique.
En Occident, on connaît tous plus ou moins quelqu’un qui, un beau jour, a décidé qu’il irait «faire de l’humanitaire» en Afrique. Parce que, vous comprenez, il y a trop de misère, trop de maladies, la guerre et beaucoup trop de souffrances et donc, il faut aider les «petits Africains».
Sur le continent, qui n’a jamais rencontré d’Occidental, souvent looké façon New Age, souvent encore trop jeune, jurant, la main sur cœur, être venu «sauver l’Afrique»?
Il suffit d’une guerre, d’une grave crise ou d’une épidémie —comme c’est le cas actuellement avec le virus Ebola dans certains pays d’Afrique de l’Ouest— pour que cet angélisme atteigne les paroxysmes les plus fous. Campagnes de fundraising par-ci et initiatives individuelles pour «aider» et surtout pour «informer le monde» (comprenez l’Occident) par-là. Une démarche qui conduit bien souvent ceux qui les entreprennent à prendre des risques inconsidérés.
Ainsi, il y a quelques semaines, Kieran Kesner, un jeune photographe new-yorkais, décide de se rendre au Liberia en plein désarroi face à l’épidémie de fièvre hémorragique.
«Je savais que c’était dangereux. Mais j’ai considéré que c’était de ma responsabilité d’aller témoigner de ce qui s’y passe. C’était plus fort que moi», a confié le jeune photographe au site Mashable, en présentant les clichés effrayants qu’il a ramenés de Monrovia.Kieran Kesner n’a pas été touché par le virus. Mais il a de toute évidence pris un risque fou en se promenant dans le bidonville de West Point (important foyer d’Ebola), parfois sans encadrement des équipes de santé.
L’idée du jeune photographe new-yorkais est généreuse et ressemble à toutes ces innombrables initiatives visant à aller aider les Africains à sortir de l’enfer. Ces initiatives sont généreuses mais dangereuses. Dangereuses parce qu’elles se fondent toutes sur les clichés les plus absurdes. Le premier des stéréotypes étant cette conception chez beaucoup d’Occidentaux que l’Afrique est un pays. Non, vraiment, que ce soit bin clair, une fois pour toutes, l’Afrique n’est pas un pays, comme nous avons déjà eu l’occasion de le souligner.
Sur ce point l’ONG norvégienne SAIH qui lutte contre les stéréotypes sur l’Afrique a visé juste avec sa toute nouvelle vidéo satirique. Dans ce document, on voit une jeune Occidentale qui rêve d’aller «aider les petits Africains», alors qu’elle n’a pas la moindre idée des spécificités, des différences et des complexités de cet immense continent.
L’ONG SAIH (née en 1961, au tout début de la mobilisation internationale contre l’apartheid) s’est fait une spécialité de tordre le cou à de telles vraies-fausses bonnes consciences. En 2013, elle publiait une vidéo qui ne manquait pas de saveur et que nous avions relayée sur Slate Afrique.
Les campagnes choc de SAIH en ont inspiré d’autres. Il y a peu de temps, l’ONG Solidarités International a publié des vidéos tout aussi satiriques.
Une Hippie passe un entretien d’embauche par Solidaritesinternational
Le but de cette campagne, avait expliqué l’ONG, était de montrer que «le métier d’humanitaire ne s’improvise pas, tout le monde ne peut pas aider sur le terrain».
Mais, peut-être cela signifie-t-il aussi que la vraie compassion, la vraie solidarité commence par l’humilité de reconnaître qu’on ne peut pas du jour au lendemain aller jouer les Zorro quelque part, surtout quand on ne sait rien de ce quelque part.
Raoul Mbog