François Hollande sera vendredi 22 août à Mayotte, département français de l’Océan indien, après un passage à La Réunion, et avant de partic...
François Hollande sera vendredi 22 août à Mayotte, département français de l’Océan indien, après un passage à La Réunion, et avant de participer à Moroni (Comores) à un sommet régional. À cette occasion, le président d’honneur du Secours Catholique François Soulage, ainsi que les responsables des Apprentis d’Auteuil et de Médecins du Monde, lancent un appel face à la détresse sociale et au manque de moyens à Mayotte dans une tribune publiée mardi 19 août sur Rue89.
Mayotte est loin de la métropole, mal desservie, quasi inconnue de la plupart des Français et dans une situation économique dramatique. Elle est pourtant devenue en 2011 le 101e département français.
Engagés à Mayotte depuis plusieurs années, le Secours Catholique, Apprentis d’Auteuil et Médecins du Monde sont les témoins quotidiens de la situation d’extrême précarité dans laquelle vit une grande partie de la population, en particulier les plus jeunes.
La jeunesse est bien la plus grande richesse de Mayotte. La moitié de sa population a moins de 18 ans. Ces jeunes dégagent une énergie, un désir de vivre et d’apprendre extraordinaires. Lors d’une mission sur place en juin, nous l’avons constaté en nous rendant dans des lieux d’apprentissage et en rencontrant des jeunes Mahorais et d'autres comoriens. Poussés par l’envie de participer au développement de leur île et de construire leur propre avenir, ces jeunes s’investissent dans la vie politique et s’engagent dans les associations.
Comme nous, plusieurs associations, sur place, s’acharnent sans faiblir pour accompagner les publics les plus fragiles (mineurs en danger, handicapés, sans papiers…) dans leur accès aux droits : droit à l’éducation, à la formation, à l’identité, à la protection et à la santé. Un combat partagé par les élus locaux et les services publics de l’île.
Cependant les moyens humains et financiers mobilisés aujourd’hui par la République ne sont pas à la hauteur des besoins.
Comment alors peut-il aborder des études supérieures dans de bonnes conditions ? Les chiffres sont criants :le taux d’échec des mahorais en première année d’études supérieures est de 90 %.
En matière de santé et de précarité, l’Aide Médicale d’État (AME) et la Couverture médicale Universelle (CMU) n’existent pas à Mayotte et un dispositif de “bons” pour les plus vulnérables reste aléatoire. L’accès à la sécurité sociale reste parfois difficile pour ceux qui y auraient droit. Le taux de mortalité maternelle, six fois plus élevé qu’en métropole, est essentiellement lié à des complications de la grossesse et de l’accouchement. De plus, la mortalité infantile est quatre fois plus élevée qu’en métropole.
La présence de nombreux bidonvilles avec un accès restreint à l’eau et à l’hygiène augmente le risque potentiel de maladies à caractère épidémique. Ces difficultés d’accès à l’éducation et aux soins sont démultipliées pour les jeunes sans-papiers. En matière de gestion migratoire, Mayotte fait figure d’exception. En 2012, 17 041 personnes y auraient été expulsées, dont 3 827 mineurs, ce qui représente près de 46 % des étrangers reconduits à la frontière pour l’ensemble du territoire national et qui témoigne des pressions exercées au quotidien sur les migrants précaires.
Qu’ils soient nés en France ou aux Comores, certains jeunes sont dans des situations administratives hors normes qui les coupent de tous les services publics et droits auxquels ils peuvent pourtant légitimement prétendre.
Autre drame : celui de ces jeunes nés à Mayotte mais dont la naissance n’a pas été enregistrée selon les normes métropolitaines, qu’on appelle les “ni-ni” – ni expulsables, ni régularisables – et dont le statut et l’horizon demeurent totalement flous au risque de créer du désespoir et de la violence. Dans le cadre de leurs démarches de régularisation ou de naturalisation, ils subissent des procédures tatillonnes, voire suspicieuses, et des comportements racistes.
Aujourd’hui, les différents acteurs ont encore des difficultés à se rejoindre sur l’analyse des problèmes et la proposition de solutions adaptées. C’est pourquoi la première étape est de mettre en place un dialogue qui intègre les pouvoirs publics, les associations, les habitants – et plus particulièrement les jeunes –, et dont l’État serait le chef d’orchestre, afin de construire ensemble un plan d’avenir pour la jeunesse.
En métropole, nos associations ont construit avec les pouvoirs publics le plan national de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion, dont les départements d’Outremer ont été exclus.
Selon la même méthode, nous demandons la mise en place d’une concertation entre les acteurs de la société civile et les pouvoirs publics, afin de concevoir, avec les Mahorais, un plan “Mayotte Jeunesse”.
Monsieur le président de la République, l’heure est désormais à l’action. Vous qui serez à Mayotte cette fin de semaine et qui avez déclaré vouloir « remettre l’éducation et la jeunesse au cœur de l’action publique Outre-mer », engagez-vous à concevoir avec la jeunesse mahoraise un meilleur avenir !
Bernard Prévost, président du conseil d’administration d’Apprentis d’Auteuil
Olivier Lebel, directeur général de Médecins du Monde
François Soulage, président d’honneur du Secours Catholique
Mayotte est loin de la métropole, mal desservie, quasi inconnue de la plupart des Français et dans une situation économique dramatique. Elle est pourtant devenue en 2011 le 101e département français.
Engagés à Mayotte depuis plusieurs années, le Secours Catholique, Apprentis d’Auteuil et Médecins du Monde sont les témoins quotidiens de la situation d’extrême précarité dans laquelle vit une grande partie de la population, en particulier les plus jeunes.
La jeunesse est bien la plus grande richesse de Mayotte. La moitié de sa population a moins de 18 ans. Ces jeunes dégagent une énergie, un désir de vivre et d’apprendre extraordinaires. Lors d’une mission sur place en juin, nous l’avons constaté en nous rendant dans des lieux d’apprentissage et en rencontrant des jeunes Mahorais et d'autres comoriens. Poussés par l’envie de participer au développement de leur île et de construire leur propre avenir, ces jeunes s’investissent dans la vie politique et s’engagent dans les associations.
Comme nous, plusieurs associations, sur place, s’acharnent sans faiblir pour accompagner les publics les plus fragiles (mineurs en danger, handicapés, sans papiers…) dans leur accès aux droits : droit à l’éducation, à la formation, à l’identité, à la protection et à la santé. Un combat partagé par les élus locaux et les services publics de l’île.
Cependant les moyens humains et financiers mobilisés aujourd’hui par la République ne sont pas à la hauteur des besoins.
Des investissements étatiques bien moindres pour les jeunes de Mayotte
La dépense publique moyenne par habitant à Mayotte est bien inférieure à celle engagée pour les métropolitains (4 700 € par Mahorais contre 17 300€ par métropolitain – 2013 – IRES), en particulier en matière d’éducation puisque l’État y dépense deux fois moins par élève qu’en métropole. Le manque de salles de classe oblige à dispenser les cours en alternance, le matin ou l’après-midi. Résultat : au terme de son cursus scolaire, un bachelier mahorais aura suivi moitié moins d’heures de cours qu’un bachelier métropolitain.Comment alors peut-il aborder des études supérieures dans de bonnes conditions ? Les chiffres sont criants :le taux d’échec des mahorais en première année d’études supérieures est de 90 %.
En matière de santé et de précarité, l’Aide Médicale d’État (AME) et la Couverture médicale Universelle (CMU) n’existent pas à Mayotte et un dispositif de “bons” pour les plus vulnérables reste aléatoire. L’accès à la sécurité sociale reste parfois difficile pour ceux qui y auraient droit. Le taux de mortalité maternelle, six fois plus élevé qu’en métropole, est essentiellement lié à des complications de la grossesse et de l’accouchement. De plus, la mortalité infantile est quatre fois plus élevée qu’en métropole.
Un accès aux soins difficile
L’île fait face à un déficit structurel en termes d’offre de soins puisqu’elle compte seulement 77 praticiens pour 100 000 quand la moyenne nationale en 2013 est de 333 pour 100 000 habitants.La présence de nombreux bidonvilles avec un accès restreint à l’eau et à l’hygiène augmente le risque potentiel de maladies à caractère épidémique. Ces difficultés d’accès à l’éducation et aux soins sont démultipliées pour les jeunes sans-papiers. En matière de gestion migratoire, Mayotte fait figure d’exception. En 2012, 17 041 personnes y auraient été expulsées, dont 3 827 mineurs, ce qui représente près de 46 % des étrangers reconduits à la frontière pour l’ensemble du territoire national et qui témoigne des pressions exercées au quotidien sur les migrants précaires.
Qu’ils soient nés en France ou aux Comores, certains jeunes sont dans des situations administratives hors normes qui les coupent de tous les services publics et droits auxquels ils peuvent pourtant légitimement prétendre.
Mineurs migrants : livrés à eux-mêmes
Des jeunes migrants dont les parents sont expulsés se retrouvent totalement livrés à eux-mêmes. 3 000 mineurs seraient ainsi isolés et donc sans protection. Ces jeunes vivent dans la peur et l’instabilité. Même si l’école est en principe garantie jusqu’à 16 ans, ils suivent des scolarités en pointillé et n’ont au-delà de cet âge plus accès à aucune formation. Comment alors se construire un avenir ?Autre drame : celui de ces jeunes nés à Mayotte mais dont la naissance n’a pas été enregistrée selon les normes métropolitaines, qu’on appelle les “ni-ni” – ni expulsables, ni régularisables – et dont le statut et l’horizon demeurent totalement flous au risque de créer du désespoir et de la violence. Dans le cadre de leurs démarches de régularisation ou de naturalisation, ils subissent des procédures tatillonnes, voire suspicieuses, et des comportements racistes.
L’urgence d’agir
Au vu de ce constat alarmant, il est urgent d’agir pour donner une chance de développement à cette île et répondre aux attentes de tous ces jeunes qui regardent vers la métropole avec espérance.Aujourd’hui, les différents acteurs ont encore des difficultés à se rejoindre sur l’analyse des problèmes et la proposition de solutions adaptées. C’est pourquoi la première étape est de mettre en place un dialogue qui intègre les pouvoirs publics, les associations, les habitants – et plus particulièrement les jeunes –, et dont l’État serait le chef d’orchestre, afin de construire ensemble un plan d’avenir pour la jeunesse.
En métropole, nos associations ont construit avec les pouvoirs publics le plan national de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion, dont les départements d’Outremer ont été exclus.
Selon la même méthode, nous demandons la mise en place d’une concertation entre les acteurs de la société civile et les pouvoirs publics, afin de concevoir, avec les Mahorais, un plan “Mayotte Jeunesse”.
Monsieur le président de la République, l’heure est désormais à l’action. Vous qui serez à Mayotte cette fin de semaine et qui avez déclaré vouloir « remettre l’éducation et la jeunesse au cœur de l’action publique Outre-mer », engagez-vous à concevoir avec la jeunesse mahoraise un meilleur avenir !
Bernard Prévost, président du conseil d’administration d’Apprentis d’Auteuil
Olivier Lebel, directeur général de Médecins du Monde
François Soulage, président d’honneur du Secours Catholique