Le pays doit se préparer au pire: les élections législatives n’auront pas lieu. Sur le plan politique, l’année 2014 ne sera pas une ann...
Le pays doit se préparer au pire: les élections législatives n’auront pas lieu.
Sur le plan politique, l’année 2014 ne sera pas une année facile et faste aux Comores. Pis, elle sera théoriquement une année dangereuse à plus d’un titre. Déjà, en avril 2014, prenait fin le mandat des Députés. À cette occasion, on a entendu les exégèses les plus saugrenues, les interprétations les plus intéressées et les plus fallacieuses, le tout pour proroger indûment le mandat de Députés à l’utilité plus que douteuse et suspecte jusqu’en novembre 2014. On a vu un Président de la République étaler sur la place publique son inculture juridique et politique, en méprisant une décision rendue par la Cour constitutionnelle sur la fin du mandat des Députés en avril 2014, alors que les décisions de la Cour s’appliquent erga omnes et sont insusceptibles de tout recours. En d’autres termes, ce qu’a fait le chef de l’État constitue un acte très grave par lequel a été ignoré l’un des principes juridiques les plus importants, celui de l’inviolabilité des décisions rendues par la plus haute juridiction constitutionnelle, la gardienne de la Constitution. Après avoir convoqué les Conseillers des îles comme de simples et lugubres sous-préfets, le chef de l’État est arrivé à imposer le mois de novembre 2014 comme celui de l’organisation des élections législatives, et les grandes manœuvres politiciennes ont commencé autour de Houssen Hassan Ibrahim, ministre de l’Intérieur, de l’Information, de la Décentralisation, chargé des Relations avec les Institutions (ouf, ouf…), qui aura la charge d’organiser et de truquer les élections dans la pure tradition politique des Républiquettes bananières.
En réalité, Houssen Hassan Ibrahim tient un langage très inquiétant car, quand on est à la tête d’un ministère qui doit organiser des élections législatives pour purifier un pays de ses maux et malédictions, on prend ses dispositions, notamment financières. Or, les partenaires traditionnels des Comores ne vont pas mettre la main à la poche pour débourser l’intégralité de la somme nécessaire à l’organisation de ce scrutin de tous les dangers théoriques. Et si les partenaires des Comores ne financent pas ces élections, on ne voit pas comment le pays pourra faire face à une dépense de plus de 2 milliards de francs comoriens, à un moment où, pour payer les salaires des fonctionnaires à la fin du mois de mai 2014, il a fallu dépêcher une délégation comorienne au Moyen-Orient pour vendre un total de 1.200 passeports. Quand on a les moyens de payer des brouettes d’argent au Président et à ses inutiles et encombrants prédécesseurs que sont le Colonel Azali Assoumani et l’ancien satrape Ahmed Sambi, on doit avoir les moyens de financer des élections devant désigner les membres de la représentation nationale.
Maintenant, alors qu’il est de plus en plus certain que les Comores ne pourront guère faire face aux implications financières de cette élection, on se pose de nombreuses questions sur ce que sera la réaction de l’«opposition». Or, justement, il n’y a pas d’opposition aux Comores, celle-ci étant désormais incarnée par des jeunes contestataires de Djoiezi emprisonnés à la suite du tract du 1er mai 2014 et non par des partis politiques inexistants et qui servent juste à légitimer la prétendue démocratie comorienne. Bien évidemment, on peut craindre la montée de la colère dans les appareils d’un certain nombre de partis politiques, mais il faut compter avec la lâcheté des dirigeants de ces carcans et carcasses à l’utilité suspecte. Mais, il y a pire, puisque le régime politique actuel a prouvé qu’il n’accepte aucune forme de contestation possible. Il l’a prouvé, en interdisant toutes les manifestations à caractère social, économique et politique, en ayant recours à des milices privées et à des voyous de quartiers, qu’il payait pour casser tout mouvement de contestation.
Malgré les risques de voir le mois de novembre 2014 passer sans la moindre élection de Députés, Saïd-Abdillah Saïd-Ahmed, chef du mouvement Comores Alternative, s’entête comme une mule et claironne sur les toits qu’il va quitter la France et s’installer aux Comores. C’est bien sympathique de rentrer chez soi, mais si c’est pour aller prendre part à des élections qui ne vont pas avoir lieu, on n’en voit pas l’utilité. Il faut donc être réaliste et admettre tout de suite qu’aucune élection législative n’aura lieu en novembre 2014. Est-ce que le gouvernement va alors se substituer au Parlement et adopter des ordonnances ou est-ce que la législature actuelle va continuer en toute illégalité jusqu’à la fin des temps? À partir du moment où le Président de la République est assis sur le Droit et piétine dédaigneusement celui-ci, les Comores sont exposées à tous les dangers théoriques, et ce ne sont pas les petites manœuvres de l’introuvable «opposition» qui vont changer la nature très difficile des choses. Les voies de l’incertitude sont ouvertes à la circulation politicienne.
Par ARM