Échéances électorales en vue, partis politiques sans assises nationales. Les organisations politiques comoriennes refusent obstinément d...
Échéances électorales en vue, partis politiques sans assises nationales.
Les organisations politiques comoriennes refusent obstinément d'être nationales.
Question à deux sous: dans la pléthore des partis politiques comoriens qui, prétendument, «concourent à l'expression du suffrage, ainsi qu'à la formation civique et politique du peuple», d'après ce qui est mentionné dans la Constitution, quel est le seul parti qui a plus de 20 membres à Anjouan et à Mohéli ?
Question embarrassante, si l'on fait abstraction de l'Union pour la Déchéance et la Corruption (UDC), l'ancien RADECO ou Rats des Comores, le parti présidentiel, où l'on adhère par pur opportunisme et non par conviction politique, dans un pays où la conviction politique a été classée au Musée des Antiquités depuis des siècles. Et, avant de crier au scandale et à la provocation, il faudrait que le parti politique que la question va énerver nous cite ses 20 Anjouanais et ses 20 Mohéliens. Il n'est pas dit que les partis n'en ont pas, mais on veut qu'on nous dise lesquels. Il va sans dire qu'il sera impossible pour 99,99% de ces chères organisations politiques de prouver qu'elles sont vraiment nationales au regard de leurs assises territoriales et des origines de leurs membres.
Cela étant, les partis existent en un nombre qui correspond au nombre de moustiques composant une nuée de moustiques, mais le plus souvent, l'élément insulaire prévaut et parfois, on se rend compte que ces partis n'ont d'assises que dans une région de telle île ou de telle autre, mais de partis nationaux, point. Ne cherchez pas, il n'y en a pas. Quand on fait une enquête approfondie sur les formations partisanes qui font parler d'elles depuis longtemps, à savoir, le Mouvement Orange, le RIDJA et la CRC, il faudra un microscope électronique couplé à un télescope de la NASA pour compter leurs Mohéliens et leurs Anjouanais. Là, il s'agit des trois grands partis, les plus grands, les mieux enracinés sur le paysage politique des Comores, et non des gadgets politiques qui essaient d'exister par la gesticulation dramatique. Ce n'est pas fameux. Non, ce n'est pas du tout fameux.
Tout le monde connaît la passion des Comoriens pour ce qu'ils appellent «la politique», sans qu'on ne sache exactement ce que c'est. Et les Comoriens de France sont plus mordus de «politique» que ceux restés aux Comores. Naturellement, à tout moment et dans n'importe quelle ville de France où vivent plus de 50 Comoriens, ils créent «partis politiques» sur «partis politiques», comme quand 2 Cambodgiens qui se croisent à l'étranger créent une ONG. Mais, ils sont plus préoccupés par la nécessité d'y faire figurer au moins 1 Anjouanais et 1 Mohélien, pour des raisons de crédibilité, que d'avoir une implantation politique réelle aux Comores. Est-ce à dire que les partis politiques sont une affaire grande-comorienne?
Il ne faut pas aller jusqu'à cette extrémité, mais, en même temps, il faut avoir le courage de reconnaître qu'Anjouanais et Mohélien ne s'intéressent à rien en politique, sauf quand il s'agit de partager les «avantages» immédiats du pouvoir déjà en place. En France, rares sont les Anjouanais et les Mohéliens qui se mobilisent pour la politique et qui militent vraiment, alors que leurs frères et surs de Grande-Comore ne reculent devant aucun sacrifice pour des manifestations et des réunions politiques exigeant de longs et coûteux déplacements, y compris aux Comores. Les champions de la désaffection partisane ont un argument censé être imparable: «Samedi, j'amène les enfants au parc pour qu'ils jouent au football, et dimanche, je les accompagne à l'école coranique. Je n'ai que le week-end pour m'occuper de ces choses-là». En entendant ça, on a envie de pleurer d'émotion. Quelle grandeur d'âme!
En même temps, il faudra bien s'interroger sur cette désaffection partisane, car elle a des raisons. En fait, les partis politiques comoriens, pour leur écrasante majorité, manquent de crédibilité. Dans l'Antiquité politique comorienne, le Parti Blanc, le Parti Vert, le Front démocratique et l'Udjamaa mobilisaient parce qu'ils avaient des leaders crédibles aux yeux de la population et parce qu'ils représentaient un idéal, qu'on ne retrouve plus dans l'agitation des carcasses politiques d'aujourd'hui.
Les partis politiques comoriens proposent quoi au bon peuple des Comores? Quelle est l'utilité de l'objet prétendument politique mais bien barbu et non identifié qu'est le FNJ sur le paysage politique comorien en 2013? Les Comores ont-elles vraiment besoin de cette carcasse d'hyène dont on n'entend parler que quand l'un des siens a été nommé à un poste où il n'a aucune compétence? Où est le sérieux dans tout ça? Et que vaut un parti prétendument «islamiste» dans un pays à 100% musulman? En dehors de sa propension à créer une confusion malsaine, on ne voit rien venir. Rien du tout. À titre personnel, je ne compte pas sur le FNJ pour faire de moi un bon Musulman, encore moins pour sauver les Comores.
Le Front démocratique avait un idéal progressiste à proposer aux Comoriens. Il y croyait dur comme fer, mais n'a pas survécu à l'avènement de ce pour lequel il a milité pendant des années, dans des conditions très difficiles, et parfois mortelles: l'engagement du processus de démocratisation. Mais, qui peut avoir le génie de dire aujourd'hui, samedi 17 août 2013, ce qui différencie un parti politique comorien d'un autre parti politique comorien sur le plan programmatique et idéologique, si tant est que ces carcans ont un programme et une idéologie? Et Sambi et ses sambistes ? Et Sambi et ses sambistes ?
Il se trouve même des «leaders politiques» qui ne connaissent pas les deux îles autres que celle de leur naissance, et ils prétendent à un leadership national. Plus pittoresque encore, il se trouve des leaders politiques comoriens qui n'ont pas plus d'un ami sur chacune des deux autres îles, et ils prétendent crânement diriger le pays. Un peu de modestie, Messieurs aux prétentions excessives.
Pour sa part, Mohéli n'a jamais caché sa propension à créer des partis exclusivement mohéliens. Dans les années 1970, il y a eu l'Udjamaa. Dans les années 1990, on a connu le FPC, le «C» étant pour «comorien», mais c'était de la frime, de la poudre aux yeux. On sait ce qu'il en est. Et puis, en 2013, face aux malheurs et aux deuils causés par le Gouverneur Mohamed Ali Saïd sur cette île de Mohéli, la Coordination politico-administrative (CPA) du début des années 2000 renaît de ses cendres comme le phénix, pour tenter de se positionner en organisation politique à caractère national. Au même moment, les hitlériens de l'OPIA à Anjouan font entendre de la voix, dans un discours d'une haine brute que ne renieraient ni les néonazis, ni les vrais nazis, ni le KKK aux États-Unis.
Les Comoriens doivent-ils vraiment compter sur ces organisations politiques pour espérer un mieux-vivre? En tout cas, si rien ne change, l'avenir du pays sera à l'image du présent: une montagne de désillusions. Des échéances électorales se profilent pour 2014 et 2016. Mais, avec quelles organisations politiques les Comoriens vont-ils les affronter? Vont-ils encore y aller sans véritables partis politiques et constituer par la suite une Mouvance présidentielle sans âme, ni cur, ni viabilité? Le mal vient de là et, alors Souverain du Maroc, le Roi Hassan II avait dit un mot que nous pourrions méditer: «Je sais qu'un parti ne se développe pas et ne s'ancre pas dans l'opinion en deux ou trois années au point de pouvoir gagner des élections. C'est irréaliste. []. Un parti doit posséder des assises et des structures, qu'elles soient fédératives comme le Parti socialiste français, ou plus lâches comme le Parti radical. Il lui faut du temps pour prendre racine, gagner des élections, posséder une presse».
Par ARM
© www.lemohelien.com Samedi 17 août 2013.