LE PLUS. La plaisanterie de François Hollande à l'égard de Nicolas Sarkozy a fait lever quelques boucliers à droite . Sans grande surpr...
LE PLUS. La plaisanterie de François Hollande à l'égard de Nicolas Sarkozy a fait lever quelques boucliers à droite. Sans grande surprise, les caciques de l'UMP et l'ancien présidentont fustigé le chef de l'État. Mais est-ce la petitesse supposée de la blague présidentielle qui les a tant fait réagir ? Pas pour notre contributeur Pierre Bradit, qui nous livre son analyse de la passe d'armes.
François Hollande à l'ouverture du Salon de l'agriculture, le 23 février à Paris (SIPA)
Dans ce temple des France modernes qu'est le Salon de l'agriculture s'est joué un acte essentiel du début du quinquennat de François Hollande, un pendant intérieur de la guerre au Mali.
Un acte majeur du quinquennat
Rappelons les faits : le président François Hollande, en visite d'inauguration du Salon, devise légèrement avec quelques enfants, lesquels sont étonnés qu'il soit (en vrai) si différent de l'homme "vu à la télé." Une petite fille, pour relativiser cette impression et reprendre la maîtrise du débat enfantin, déclare en lui tournant le dos qu'elle n'a "jamais vu [en vrai] Nicolas Sarkozy". Et là, François Hollande répond avec une assurance non feinte : "Ah, bah tu ne le verras plus". Impératif.
Comme vous y allez, pensez-vous. Cette saynète pour enfant, un acte majeur du quinquennat ? Quelle preuve à l'appui de cette thèse ridicule puis-je donc fournir ? Une toute simple. Nicolas Sarkozy lui-même se serait cru obligé de réagir devant un parterre de courtisans déchus : "C'était tout petit !" Et cette réaction pour le moins étrange de finir dans les colonnes du "Point" et du "Parisien".
Nous allons analyser un "petit" peu en quoi cette réponse et la séquence est caractéristique de la confusion et du déni qui domine la pensée politique du parti populaire (l'UMP) depuis la défaite du 6 mai 2012.
Des réactions absurdes et disproportionnées
Passons sur l'adjectif "petit" qui n'est pas forcément le plus percutant venant d'une personne moquée pour son complexe dû à sa taille modeste. Il y a bien plus grave que cette porte ouverte pour moquerie de commentaires. Oui, bien plus grave : cette réaction est absurde dans son énoncé.
En effet, si la sentence est si "petite"... Pourquoi réagit-il ? Pourquoi donne-t-il à ce qui serait une "blague" autant d'importance que la guerre civile en Syrie ? Et enfin, pourquoitoute une chaîne de seconds et troisièmes couteaux de la droite française ont-ils cru pertinente cette réponse absurde et contre-productive au point de la diffuser ?
La douleur. Voilà la seule raison qui explique l'occurrence de cette réponse absurde et l'incapacité de l'appareil de communication d'empêcher sa diffusion. Et cette douleur est bien le signe que cette sentence pour enfants n'est pas "petite". Allons au fait. Pourquoi les hommes et les femmes du parti populaire sont sincèrement choqués de la "petite" phrase de François Hollande ? Exactement pour l'inverse de ce qu'ils disent : parce qu'elle est de nature monarchique et que l'idée d'avoir un monarque de gauche est en soi une souffrance.
Hollande a joué au roi, et mieux que Sarkozy
La première visite de Sarkozy s'était soldée par un "casse-toi pauv'con" qui fut le fil conducteur indicible de la campagne de l'année dernière, ce slogan rageur et souterrain, la lentille d'exaspération du foyer de la victoire. Et là, cinq ans plus tard, François Hollande a transmuté cette sentence vulgaire en une "petite" condamnation à mort, ou plus exactement une condamnation à une "petite" mort". Cette transmutation, associée à la condamnation, ce sont des traits monarchiques.
Dans cette saynète pour enfants, François Hollande à joué au roi, au roi d'un instant, au roi pour enfants. Le problème et la souffrance de la droite, c'est qu'il a été bon, pas transcendant mais juste bon. Dans la posture - le geste du bras droit ! - le message, la transmutation du récit, toutes ces figures monarchiques exécutées presque sans y penser, en y ajoutant son univers - cette distance ironique - et sa signature - cette sourde férocité. Cette séquence montre que Hollande a endossé l'habit de monarque républicain de façon plus intense que son prédécesseur :
C'est déjà une souffrance pour l'homme ou la femme de droite d'avoir un monarque républicain de gauche mais alors, lui rappeler avec tant de force et de lucidité qu'ils soutiennent tous - mordicus - un "petit" garçon qui n'est jamais arrivé à jouer ce rôle, même pour des enfants. Là commence la douleur.
Le Nouvel Observateur
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