L’excision, ou mutilation génitale féminine , a été interdite en Égypte en 2007, après la mort d’une fillette de 12 ans lors d’une opérati...
L’excision, ou mutilation génitale féminine, a été interdite en Égypte en 2007, après la mort d’une fillette de 12 ans lors d’une opération. Cette tradition ancestrale persiste pourtant dans l’illégalité et des hommes politiques conservateurs se battent en ce moment pour qu’elle soit de nouveau autorisée.
En 2008, plus de 90 % des Égyptiennes en âge d’avoir des enfants ont subi une excision, selon une enquête des autorités égyptiennes. Malgré les campagnes de sensibilisation, le pourcentage des jeunes filles de 15 à 17 ans excisées n’est passé que de 77 à 74 % entre 2005 et 2008. En Égypte, l’opération consiste en une ablation du clitoris et parfois des lèvres vaginales. L’objectif est, entre autre, de réduire le désir sexuel de la femme et donc de protéger sa virginité.
La révolution égyptienne n’a en rien aidé les militants anti-excision dans leur combat. Les deux-tiers des sièges de la chambre basse du Parlement égyptien ont été remportés par des députés islamistes, notamment du parti des Frères musulmans, ou salafistes - une branche radicale de l’islam sunnite. Au début de la semaine, Nasser al-Shaker, député du parti salafiste al-Nour, a défendu l’excision lors d’un passage à la télévision, affirmant qu’il s’agissait d’un précepte de l’islam. Le parlementaire a par ailleurs précisé, comme un argument supplémentaire pour la levée de l’interdiction, que l’ex-première dame, Suzanne Moubarak, s’était battue pour éradiquer cette pratique. Une position qui a provoqué l’ire des groupes de défense des droits des femmes.
Quelques semaines auparavant, la parlementaire Azza al-Garf, du parti des Frères musulmans, appelait à la levée de l’interdiction.
Des rumeurs circulent enfin sur Internet sur une caravane médicale, dans laquelle était pratiqué l’excision, qui aurait été installée par les Frères musulmans dans la région de Minya, au nord de l’Égypte. FRANCE 24 n’a pu vérifier ces informations. Le parti des Frères musulmans a toutefois rejeté ces accusations tout en affirmant via Twitter que le parti était officiellement opposé à l’excision.
En 2008, plus de 90 % des Égyptiennes en âge d’avoir des enfants ont subi une excision, selon une enquête des autorités égyptiennes. Malgré les campagnes de sensibilisation, le pourcentage des jeunes filles de 15 à 17 ans excisées n’est passé que de 77 à 74 % entre 2005 et 2008. En Égypte, l’opération consiste en une ablation du clitoris et parfois des lèvres vaginales. L’objectif est, entre autre, de réduire le désir sexuel de la femme et donc de protéger sa virginité.
La révolution égyptienne n’a en rien aidé les militants anti-excision dans leur combat. Les deux-tiers des sièges de la chambre basse du Parlement égyptien ont été remportés par des députés islamistes, notamment du parti des Frères musulmans, ou salafistes - une branche radicale de l’islam sunnite. Au début de la semaine, Nasser al-Shaker, député du parti salafiste al-Nour, a défendu l’excision lors d’un passage à la télévision, affirmant qu’il s’agissait d’un précepte de l’islam. Le parlementaire a par ailleurs précisé, comme un argument supplémentaire pour la levée de l’interdiction, que l’ex-première dame, Suzanne Moubarak, s’était battue pour éradiquer cette pratique. Une position qui a provoqué l’ire des groupes de défense des droits des femmes.
Quelques semaines auparavant, la parlementaire Azza al-Garf, du parti des Frères musulmans, appelait à la levée de l’interdiction.
Des rumeurs circulent enfin sur Internet sur une caravane médicale, dans laquelle était pratiqué l’excision, qui aurait été installée par les Frères musulmans dans la région de Minya, au nord de l’Égypte. FRANCE 24 n’a pu vérifier ces informations. Le parti des Frères musulmans a toutefois rejeté ces accusations tout en affirmant via Twitter que le parti était officiellement opposé à l’excision.
Contributeurs
"L’excision n’est pas un acte religieux, c’est une tradition"
Nourhan Refaat, 22 ans, vit au Caire où elle travaille comme consultante dans le domaine des réseaux sociaux. Elle fait partie des centaines de personnes à avoir signé une pétition contre l’excision adressée au Parlement égyptien.
Le fait que des parlementaires ont osé appeler à la levée de l’interdiction de l’excision m’a réellement choquée, d’autant plus quand le message a été porté par une femme. C’est un signe pour moi que l’Égypte régresse.
L’excision n’est pas un acte religieux, c’est une tradition. Malheureusement, certains membres des Frères musulmans et des salafistes semblent l'ignorer et contribuent à faire circuler l’idée que cette pratique est dictée par l’islam. Cette pratique est absente de nombreux pays musulmans. D’ailleurs en Égypte, l’excision est pratiqué par les musulmans comme par les chrétiens.
"Ils veulent absolument éviter que leur fille ne connaisse la sexualité avant le mariage"
Les Égyptiennes ayant la vingtaine ou la trentaine, éduquées et faisant partie des classes privilégiées de la société, sont complètement opposées à l’excision. Je n’ai jamais rencontré qui que ce soit de mon âge qui défende ces pratiques. C’est d’ailleurs un sujet dont nous parlons librement grâce aux campagnes télévisées diffusées dans les années 2000. Ca a permis de nous sensibiliser sur la question et de nous permettre d’avoir un avis critique. Les femmes qui ont été excisées, elles, ne le disent pas. C’est trop personnel et pour certaines c’est un véritable traumatisme. Dans la génération de mes parents, seule une petite partie est contre (heureusement, mes parents en font partie). Même les plus éduqués ont fait exciser leurs filles car ils voulaient absolument éviter qu’elles ne connaissent la sexualité avant le mariage.
"Je pense qu’une femme a le droit de vivre normalement sa sexualité après le mariage"
Bien entendu, ces raisonnements sont absurdes. Et les effets de l’excision durent toute la vie. Je pense qu’une femme a le droit de vivre normalement sa sexualité après le mariage.
Pendant la révolution égyptienne, le système politique a changé, mais certaines croyances sont encore bien ancrées. Je pense qu’il faudra attendre la prochaine génération pour que cette pratique soit enfin éradiquée – et pour ça il faudra aussi que l’extrémisme arrête de progresser.
L’excision n’est pas un acte religieux, c’est une tradition. Malheureusement, certains membres des Frères musulmans et des salafistes semblent l'ignorer et contribuent à faire circuler l’idée que cette pratique est dictée par l’islam. Cette pratique est absente de nombreux pays musulmans. D’ailleurs en Égypte, l’excision est pratiqué par les musulmans comme par les chrétiens.
"Ils veulent absolument éviter que leur fille ne connaisse la sexualité avant le mariage"
Les Égyptiennes ayant la vingtaine ou la trentaine, éduquées et faisant partie des classes privilégiées de la société, sont complètement opposées à l’excision. Je n’ai jamais rencontré qui que ce soit de mon âge qui défende ces pratiques. C’est d’ailleurs un sujet dont nous parlons librement grâce aux campagnes télévisées diffusées dans les années 2000. Ca a permis de nous sensibiliser sur la question et de nous permettre d’avoir un avis critique. Les femmes qui ont été excisées, elles, ne le disent pas. C’est trop personnel et pour certaines c’est un véritable traumatisme. Dans la génération de mes parents, seule une petite partie est contre (heureusement, mes parents en font partie). Même les plus éduqués ont fait exciser leurs filles car ils voulaient absolument éviter qu’elles ne connaissent la sexualité avant le mariage.
"Je pense qu’une femme a le droit de vivre normalement sa sexualité après le mariage"
Bien entendu, ces raisonnements sont absurdes. Et les effets de l’excision durent toute la vie. Je pense qu’une femme a le droit de vivre normalement sa sexualité après le mariage.
Pendant la révolution égyptienne, le système politique a changé, mais certaines croyances sont encore bien ancrées. Je pense qu’il faudra attendre la prochaine génération pour que cette pratique soit enfin éradiquée – et pour ça il faudra aussi que l’extrémisme arrête de progresser.
Nourhan Refaat
"Beaucoup de médecins, partout dans le pays, continuent de pratiquer cette opération en cachette"
Hussein Sherif Gohar est gynécologue au Caire, dans un centre de soin pour les femmes.
Je pense que le pourcentage de femmes excisées dépasse largement les 90 % en Égypte. Mais ma clinique est au Caire et mes clientes viennent de milieux aisés. Peu parmi elles sont donc excisées. Seules les plus âgées le sont. Mais en dehors des grandes villes, cette pratique est toujours généralisée.
L’interdiction de l'excision ne fonctionne pas. Beaucoup de médecins, partout dans le pays, continuent de pratiquer cette opération en cachette. Ils sont censés dénoncer les parents qui le leur demandent. Mais les praticiens aussi pensent que c’est une bonne chose. Alors pourquoi le signaleraient-ils ? Ils n’en parlent que si l’opération tourne vraiment mal.
J’ai participé il y a quelques temps à un débat télévisé sur l'excision. J’ai dit à l’intervenant qui défendait cette pratique : "Si vous voulez couper le clitoris d’une fille, pourquoi ne pas vous couper aussi le pénis ?". En réalité, mutiler les parties génitales n’enlève pas le désir. C’est comme lorsqu’on vous enlève la langue, vous avez toujours envie de manger, c’est juste que vous ne le pouvez plus.
L'excision cause un traumatisme psychologique grave. C’est très douloureux et, parce que le clitoris est très près d’une artère, l’opération peut être fatale. J’ai aussi traité de nombreuses femmes qui avaient développé des kystes après l’opération. Et même s’il n’y a pas de complication, ces jeunes femmes n’auront jamais de rapport normal de toute leur vie.
"Le combat se joue dans les villages, pas au Parlement "
Bien sûr, je suis choqué que des hommes politiques prennent position contre l’interdiction de cette pratique. Mais au final je ne pense pas que la réponse à ce problème soit dans la loi. Le combat se joue dans les villages, pas au Parlement. Ce dont nous avons besoin, c’est de davantage d’éducation. Et pas seulement de la part d’activistes, des jeunes qui viennent des villes, ou de médecins comme moi, il faut que des organismes religieux prennent en main cette question. Seuls les musulmans modérés peuvent expliquer qu’il ne s’agit pas d’une pratique religieuse, mais d’une tradition dangereuse.
L’interdiction de l'excision ne fonctionne pas. Beaucoup de médecins, partout dans le pays, continuent de pratiquer cette opération en cachette. Ils sont censés dénoncer les parents qui le leur demandent. Mais les praticiens aussi pensent que c’est une bonne chose. Alors pourquoi le signaleraient-ils ? Ils n’en parlent que si l’opération tourne vraiment mal.
J’ai participé il y a quelques temps à un débat télévisé sur l'excision. J’ai dit à l’intervenant qui défendait cette pratique : "Si vous voulez couper le clitoris d’une fille, pourquoi ne pas vous couper aussi le pénis ?". En réalité, mutiler les parties génitales n’enlève pas le désir. C’est comme lorsqu’on vous enlève la langue, vous avez toujours envie de manger, c’est juste que vous ne le pouvez plus.
L'excision cause un traumatisme psychologique grave. C’est très douloureux et, parce que le clitoris est très près d’une artère, l’opération peut être fatale. J’ai aussi traité de nombreuses femmes qui avaient développé des kystes après l’opération. Et même s’il n’y a pas de complication, ces jeunes femmes n’auront jamais de rapport normal de toute leur vie.
"Le combat se joue dans les villages, pas au Parlement "
Bien sûr, je suis choqué que des hommes politiques prennent position contre l’interdiction de cette pratique. Mais au final je ne pense pas que la réponse à ce problème soit dans la loi. Le combat se joue dans les villages, pas au Parlement. Ce dont nous avons besoin, c’est de davantage d’éducation. Et pas seulement de la part d’activistes, des jeunes qui viennent des villes, ou de médecins comme moi, il faut que des organismes religieux prennent en main cette question. Seuls les musulmans modérés peuvent expliquer qu’il ne s’agit pas d’une pratique religieuse, mais d’une tradition dangereuse.
Hussein Gohar
Source:france24
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