Il y a 33 ans, le 13 mai 1978, le Mongozi Ali Soilihi a été renversé par un coup d'état « commandité » par Ahmed Abdallah à la suite...
Il y a 33 ans, le 13 mai 1978, le Mongozi Ali Soilihi a été renversé par un coup d'état « commandité » par Ahmed Abdallah à la suite duquel des mercenaires français dirigés par Bob Denard instaurent un climat de terreur et de violences, réprimant tout mouvement de contestation. Le leader du Front démocratique, Moustoifa Said Cheikh revient sur cet épisode du mercenariat.
L'ancien premier ministre français. Michel Rocard, avait déclaré que le mercenaire français était en service commandé aux Comores. Comment accueillez-vous cette déclaration?
Cette déclaration est la preuve des contradictions qui minent les gouvernements français, Ils se
disent à la fois porteurs de valeurs démocratiques et, en même temps, ils sont commanditaires d'actes ignobles.
Concernant votre lutte contre les mercenaires, comment analysez-vous votre échec?
On était vaincu car le régime était fort. Notre mouvement s'est fait écrasé. Face à la violence, on devait soit baisser la tête soit de se battre. Mais le régime était sanguinaire.
A.S. KEMBA | Source : Albalad du 12/05/11
Trente-trois ans après le coup d'état ayant renversé le régime d'AIi Soilih, le 13 mai 1978, quels sont vos souvenirs sur cet événement?
C'est une date mémorable, C'était à la fois l'annonce d'une libération d'un régime autoritaire et brutal et l'avènement d'un autre régime de triste mémoire puisque C'est Bob Denard qui paraîtra le maitre d'œuvre de ce régime sanguinaire caractérisé par de violences aveugles.
L'ancien premier ministre français. Michel Rocard, avait déclaré que le mercenaire français était en service commandé aux Comores. Comment accueillez-vous cette déclaration?
C'est un aveu de taille.
Michel Rocard n'est pas n'importe qui. Ce qu'il a dit est regrettable C'est un discours qui est en déphasage avec ces valeurs que la France dit vouloir défendre dans le monde.Cette déclaration est la preuve des contradictions qui minent les gouvernements français, Ils se
disent à la fois porteurs de valeurs démocratiques et, en même temps, ils sont commanditaires d'actes ignobles.
Concernant votre lutte contre les mercenaires, comment analysez-vous votre échec?
On était vaincu car le régime était fort. Notre mouvement s'est fait écrasé. Face à la violence, on devait soit baisser la tête soit de se battre. Mais le régime était sanguinaire.
Qu'est ce qui s'est passé en mars 1985?
Il y avait une crise au camp militaire de Kandani à la suite de laquelle des militaires se sont soulevés contre leur chef. C'est dans ces circonstances que les militaires assimilent cet acte à un coup d'état. Il a eu une répression brutale. Des militants du Front démocratique avaient été conduits et jetés dans les geôles d'Abdallah.
Vous étiez l'une des victimes des mercenaires. Quel regard posez-vous sur cette période de votre vie ?
On en parlera un jour, Pour l'heure, il faut tourner la page de cette période triste durant laquelle le pays fut gouverné par des mercenaires.
Si on vous demande de résumer les méfaits des mercenaires français, qu'est-ce que vous pourrez dire?
C'est un phénomène qui a marqué toute une génération. Il ne faut pas perdre de vue que Bob Denard prétendait avoir toute la classe politique dans sa poche. Même l'armée était contaminée par l'esprit mercenaire. Il y avait deux armées, la garde présidentielle et l'armée régulière. Cet esprit mercenaire a gagné les rangs des militaires et a conduit à ces coups d'état. La situation qui traverse l'armée est le résidu de ce phénomène de mercenariat qui n'a pas été résorbé et analyser de manière consciente, Le mercenariat a miné notre armée.
La France a pris des lois contre le mercenariat. Pensez-vous que les Comores sont à l'abri de ce phénomène?
Je n'ai pas conscience que la France ait tourné cette page. Il ne faut pas dormir sur les lauriers. Il faut être vigilant et ne pas se laisser tromper.
Vous faites partie des hommes politiques qui militent pour le retour de l'île comorienne de Mayotte. Comment avez-vous accueilli la départementalisation?
Cela ne change rien. La départementalisation est un phénomène franco-français. Pour moi, Mayotte est une île occupée. Cela ne changera en rien au contexte d'injustice. C'est ce qui explique l'agressivité coloniale de la France. Les circonstances internationales rendent également possible la lutte pour la libération et la récupération d'un territoire occupé. Il nous appartient de mettre les atouts de notre côté et mettre à contribution l'assemblée nationale et le peuple. Le combat continuera.
Que pensez-vous des déclarations de certains Comoriens qui proposent d'entrer en négociations directement avec les Mahorais ?
C'est un faux débat, Nous n'avons pas un problème avec les Mahorais mais avec des colonialistes. Les Mahorais sont des Comoriens et ils le resteront pour toujours.
Quelle analyse faites-vous sur la récente crise diplomatique et surtout le compte-rendu signé par le ministre Djaffar Ahmed Mohamed Mansoib et de l'ambassadeur de France ?
Je connais la crise mais je n'ai pas connaissance du document signé. Nous avons défendu l'intégrité, nous avons répondu à l'appel sur la journée de solidarité au palais du peuple. Je ne peux pas me prononcer sur le contenu du compte rendu. Mais, je réprouve le comportement colonialiste de Luc Hallade qui, au lieu de se comporter en ambassadeur a, plutôt, pris les habits du commissaire colonial.
Et la biometrisation des Comoriens des trois iles vivant à Mayotte. Comment avez-vous accueilli cette initiative ?
Je ne sais pas comment cela va se passer. J'estime que tous les Comoriens, les Anjouanais, les Mahorais, les Mohéliens et les Grands-Comoriens ont droit à un passeport.
Les enseignants viennent de déclencher un mouvement de grève. Le mouvement s'enlise et on assiste à un dialogue de sourds. De loin, comment analysez-vous cette crise ?
C'est un problème complexe qui tombe mal avec la fin d'un régime et l'arrivée d'un autre. C'est donc une crise grave et très délicate. J'espère que le futur gouvernement aura la promptitude de prendre à bras ouvert cette crise pour ne pas compromettre nos engagements avec les institutions financières internationales mais aussi ne pas pénaliser les enfants à deux mois des examens.
A.S. KEMBA | Source : Albalad du 12/05/11